26/08/2016

La dernière place (22ème dimanche du temps)



Pourquoi ce conseil de Jésus, si ce n’est cette recommandation, de s’assoir à la dernière place (Lc 14, 1-14) ? S’agit-il seulement d’humilité ou de misérabilisme, d’une astuce qui permet de ne pas avoir honte d’être relégué et de tenter l’honneur d’être promu ?
On se doute que si l’évangile n’a rien d’autre à dire que des règles de bienséance et de bonne conduite, il n’a guère d’intérêt. Cela n’a pas empêché les chrétiens de cultiver ces règles, et si vous voulez en rire, ou en pleurer, allez voir la pièce de Jean-Luc Lagarce, Les règles du savoir-vivre dans la société Moderne.
Cela n’empêche pas les ecclésiastiques de revendiquer les honneurs, les hochets, titre de prélat, soutane filetée ou à traine (je vous recommande les photos d’un cardinal sur internet avec sa traine de plusieurs mètres de long !). Mais les ecclésiastiques ne sont pas les seuls, et nombreux parmi nous aiment les honneurs, aiment être reconnus. Et pourquoi pas.
On dira, c’est naturel ; nous cherchons à être reconnus parce que sans reconnaissance, on ne peut vivre. On dira, il faut d’abord avoir une identité, après on pourra discuter avec tous. On dira, il faut d’abord les bases, après la critique. Mais non, on apprend à se dépendre de la reconnaissance pour être disciple, frère et serviteur. Les sept milliards d’humains reçoivent-ils la reconnaissance que nous exigeons pour nous ? On reçoit son identité des autres dans la rencontre, le dialogue et le débat ; on fonde les bases à les savoir relatives, critiquables.
Sinon… sinon, c’est la guerre. Si Jésus recommande la dernière place, justement en remarquant ceux qui se placent, c’est d’abord parce que c’est la seule façon d’éviter la violence. Il suffit de regarder et c’est ce que fait Jésus. Il voit le manège, peut-être même les manigances ou les magouilles, hier comme aujourd’hui.
Etre le premier ! Et dire que l’on a enseigné cela, que l’on enseigne cela dans les meilleurs établissements catholiques ! Comme il n’y a qu’une première place, forcément, au minimum, elle est en compétition, au pire elle excite les jalousies et les haines, la violence. Le triste spectacle de la politique intérieure et internationale nous montre cela à longueur de colonnes de journaux, au point d’éclipser tous ceux qui s’engagent en politique, pour les autres, pour le bien commun, pour disparaître.
Comment se fait-il qu’une parole aussi centrale de Jésus ait été et soit encore aussi délibérément ignorée par nous-autres, ses disciples ? Les premiers seront derniers. Ce n’est pas une lubie passagère des évangiles, mais un accord de tous, et dans la répétition, pour attribuer cette conviction à Jésus. Que cherchons-nous encore les premières places ?
Oh certes, nous avons de bonnes raisons. On pourrait, dit-on, exceller et être pacifiques et même artisans de paix. On pourrait, dit-on, faire du pouvoir un service. Mais non, cela n’est pas vrai. Il faut arrêter ce genre de contorsions homilétiques ou morales. Seule la dérision des pouvoirs, à commencer par ceux qui les détiennent, peut limiter les dégâts. J’ai connu un supérieur de séminaire qui excellait à ce jeu. Il ne perdait rien de son autorité, au contraire. Il tâchait de n’être pas dupe et de rendre les autres libres. Il était au service des jeunes et se moquait de lui. Vous n’avez qu’un seul père, vous n’avez qu’un seul maître. N’appelez personne du nom de rabbi ou de père. Et l’on continue, mon père, Monseigneur, Excellence, Eminence !
Que le pouvoir soit nécessaire, qu’il vaille mieux qu’il soit tenu par les bons que par les méchants, c’est certain. Mais cela ne suffit pas. Le pouvoir corrompt, et seule sa dérision permet peut-être d’y échapper. Et la dérision du pouvoir, c’est le service, et même l’esclavage. Plus notre pouvoir est grand, en famille, dans l’entreprise, dans l’Eglise, en politique, dans une association, plus nous devons prendre la figure de l’esclave, agir comme lui, être à la merci. Ne pas croire en son pouvoir, l’exercer pourtant, c’est se faire esclave des frères.
Je ne dis rien d’original. C’est sans cesse répété par l’évangile et que nous ne voulons pas écouter, et que nous ne voulons pas voir. C’est le chemin de Jésus lui-même. Il s’est fait le serviteur, l’esclave, lui, le maître et Seigneur. C’est le scandale de l’évangile, sa vérité, le maître s’est fait serviteur, le maître est condamné comme un maudit, un vaurien.
« Vous m’appelez Maître et Seigneur, et vous dites bien, car je le suis. Si donc je vous ai lavé les pieds, moi le Seigneur et le Maître, vous aussi vous devez vous laver les pieds les uns aux autres. Car c’est un exemple que je vous ai donné, pour que vous fassiez, vous aussi comme moi j’ai fait pour vous. En vérité, en vérité, je vous le dis, le serviteur n'est pas plus grand que son maître, ni l’envoyé plus grand que celui qui l’a envoyé. Sachant cela, heureux êtes-vous, si vous le faites. » (Jn 13, 13-17)

21/08/2016

La porte étroite - Lc 13, 22-30 (21ème dimanche du temps)

A propos de Lc 13, 22-30
Le salut, c'est la rétribution de nos actes bons ou mauvais, un salaire, ou la vie et le bonheur ?
Si c'est la rétribution, il ne faut pas s'étonner que la porte soit étroite. Et encore, il est dit ailleurs que pour les hommes, c'est impossible, porte close, pire, pas de porte du tout, impasse.
Pourtant, certains s'obstinent à penser le salut comme rétribution de leurs mérites, parmi lesquels, et non des moindres, d'être des familiers du Seigneur. Nous avons mangé et bu avec toi, tu as enseigné sur nos places.
Mais comment se dire familier du Seigneur quand on pratique l'injustice, comme si le nom de Dieu était une formule magique ? (Cf. Jr, 7). N'est-ce pas pour cela que l'on ne peut prononcer le nom de Dieu, pour ne pas s'en servir comme d'une formule magique ?
Si le salut est rétribution, rien ne le garantitet surtout pas l'appartenance au (peuple du) Seigneur. Version lucanienne de la parabole des brebis et des boucs de Matthieu (Mt 25, 31 ss).

Si le salut est vie et bonheur, alors, comme la vie et le bonheur, il se reçoit. Qui s'est donné la vie ? Qui s'est donné le bonheur ?
Le salut, comme la vie, comme le bonheur, se reçoit; il ne s'achète pas ou ne se procure pas ou ne se fait pas.
Et la porte du salut est large, comme la miséricorde de Dieu. Elles sont ouvertes, les portes du salut (Ps 118, 19-21) en grand et toutes les nations y entrent, pas seulement le peuple choisi, pas seulement les amis de Dieu ou ceux que l'on appelle amis de Dieu. C'est la superbe prophétie d'Isaïe (Is 66, 18-21) que Jésus reprend ici.

Jésus parle ici comme souvent par antiphrase, ou selon une logique qui pousse à changer son regard. A question stupide, réponse stupide. A penser que le salut se fait, est rétribution, on va à l'impasse; forcément la porte est étroite et tous sont condamnés, car qui n'a jamais méprisé son frère, qui n'a jamais été injuste.

La porte du salut est large, parce que le salut, c'est Dieu qui se donne, c'est la vie et le bonheur, et Dieu ne donne pas chichement, sa miséricorde, son amour sont infinis, larges, qui embrassent la création entière.
Et si l'on veut poser la question du salut des méchants, des injustes, il faudra être soi-même des justes. Mais qui en est ?



Traducted y completed by Jean François Garneau
Is salvation really the reward for our good or bad deeds, the salary we received, at the end of our lives, for a job well done or poorly done? Or is salvation not, rather, just life and happiness, but in the fullest?
If salvation is a reward, then one must not be surprised that the door given access to it is narrow, the discipleship to get there, harsh, and the grace to get it, costly. In fact, the Gospel says elsewhere that for men and human doing, crossing that door is impossible. The door is closed or, worse still, there is no door, our hope of finding one leads to a dead end.
Yet despite all those killjoy passages in the Gospel against any attempt to think of salvation as a reward for our good deeds (among which, the most meritorious being to have gone to confession and communion regularly, so much so that one can pretend to have spent one’s life in the intimacy of the Lord). We have spent our lives eating and drinking with you, we have spent our lives following your teaching on discipleship.
But how can one pretend to be in the intimacy of the Lord when one is complicit of all the injustice that goes on in the world (the nuance between explicitly or implicitly complicit meaning next to nothing given the atrocious level of that injustice), as if God's name was a magic word (See Jeremiah 7)? Is that not why one cannot pronounce the name of God, so as not to use it as a magic word?
If salvation is a form of retribution, nothing can guarantee it, and especially not proper membership of the people of the Lord (i.e.: identity Catholicism). See the Lukan version of the parable of the sheep and the goats in Matthew (Luke 13: 22-30 being Luke’s adaptation of Matthew 25; 31-46).
On the other hand, if salvation is life and happiness, then, as is the case for life and happiness, it’s not something that can be earned, only something that can be received. Who managed, ever, to give oneself one’s life? Who managed, ever, to give oneself one’s happiness?
Salvation, like life, and like happiness, is received; it cannot be bought, it cannot even be acquired through other means (such as pleading with God with lots of weeping on the misery of our fate) and it cannot be made as a result of some costly discipleship on our part.
And yet when understood as a gift (rather than the reward for our good deeds), the doors of salvation are wide open, as wide as God’s mercy. Psalm 118: 19-21 says it in so many words: They are open, the doors of salvation, and all nations will come, not just the chosen people, not just the friends of God, those who called themselves or are callsed “friends of God”. This is the great prophecy of Isaiah (66: 18-21), which Jesus here repeats.
In short, Jesus speaks ironically in the passage of the narrow gate (i.e.: by pushing the logic the law to such an extreme that it ends up exploding). In so doing, he forces one to conversion, to change the legalistic way we look at things. Ask a stupid question and you’ll get a stupid answer, can we almost hear him say. If you want to think of salvation in terms of reward, then look at the dead end it leads you into. Of necessity, the gate of salvation will need to be narrow and all your efforts to be doomed. For all are damned in this perspective for who has never despised his brother, who has never been unjust…
The only way the door of salvation can be broad is because salvation is God Himself giving Himself to us. It is that, not costly discipleship, which is life and happiness. And God is not cheap with his gifts. His love and mercy are infinitely broad. And they embrace the whole of Creation.
And if one insists to continue raising the question of the fate of the truly wicked and the truly unjust, the only answer to be given to us is who the hell do you think you are to look upon those truly wicked and those truly unjust with such moral self-righteousness?

20/08/2016

¿Coger o acoger? (Domingo 21 del tiempo)



¡Cuánta extraña nuestra preocupación de saber quien se salve! Queremos nombrar, queremos saber, queremos conocer el juicio antes de su tiempo. ¿Por qué?
¿Para ser tranquilizados con nuestro caso? A menudo, siendo del pueblo de Dios, ya estamos más o menos seguros que todo irá bien para nosotros ¡estamos del buen lado! Pero los demás…
Ya en el primer testamento ¿no hay seguridad o certeza de salvación? Es la gloria del nombre de Dios mismo que todos reciban la salvación. Sería un fracaso para Dios que unos se pierdan. Y así él mismo se hace pastor, porque los pastores no hacen correctamente el trabajo, no se preocupan del pueblo.
Sin embargo, el pueblo de Dios, judíos como cristianos, musulmanes también, todos, pensamos que perteneciendo en la comunidad elegida, no habrá problema. ¡Pero es superstición! ¡Es magia! Un talismán, una fórmula mágica que protege sin que se trate de amor. Con Dios somos como vendedores cuando se trata de amor. ¿Bastaría que uno tenga siempre el nombre de su pajera en la boca aun que nunca la vea? ¿Qué sentido decir el nombre de Dios ‑lo que no se permite por esta razón precisamente‑ si nunca decimos algo a Dios, si nunca nos dirigimos a él?
La respuesta de Jesus a la pregunta de saber quién podrá entrar en el reino de Dios se hace en dos momentos. Primero, la puerta esta estrecha. Segundo, el criterio de la salvación.
La puerta esta estrecha, el camino es difícil. ¿De verdad? En todas las escrituras Dios se muestra como el que perdona, que perdona todo, setenta veces siete veces. El es el misericordioso. ¿Cómo pensar que sea difícil entrar en el reino? La puerta de la misericordia esta ancha.
Si contamos con nosotros y no con Dios, es muy claro, es imposible. Para los hombres, es imposible. La salvación, como la vida, es algo que se recibe, no que se puede comprar, adquirir, obtener. Pero pensamos que los meritos tienen que ser pagados. Pensamos que una vida buena vale una retribución. Pensando así, nos olvidamos que solamente se puede recibir la vida. Nadie puede dársela. Lo mismo con la felicidad. ¿Quién se la ha dado? La salvación es vida y felicidad y no nos la podemos dar. Pensar en Dios con el modelo de la retribución en lugar del amor no prohíbe entender cualquier cosa de Dios.
La respuesta de la puerta estrecha es una antífrasis. ¡A preguntas estúpidas, respuestas estúpidas! “¿«Serán pocos los que se salven?» Jesús les dijo: «Esforzaos en entrar por la puerta estrecha.»” ¿Qué nos importa el número de salvados? No es el problema. El problema es el de la vida, es decir de la acogida de la vida. Una vez más, la vida sólo se puede acoger, nunca coger. ¿Cómo dejar la vida de Dios ser la nuestra? Es el sentido de la vida y de las palabras de Jesus.
De verdad, la puerta no está estrecha, porque Dios nunca cesa de darnos la vida, de darnos su vida, de darse, de ofrecerse. La salvación corre como un torrente después de la lluvia, transformando el desierto en un valle fértil.
Por lo tanto, abandonando la idea de la retribución, algunos piensen que no vale la pena romperse la cabeza. Si Dios siempre perdona ¿por qué hacer el bien? ¡Pero, qué razonamiento! Vivir en paz y feliz con los demás ¿sería una carga pesada de tal modo que preferíamos hacer el mal?
Pues viene el segundo punto de la respuesta de Jesus, el criterio de la salvación. Es el tema de la parábola de las ovejas y de las cabras que acabamos de oír en la versión de Lucas, menos conocida que la de Mateo. Despreciar a cualquier hermano, a cualquier hombre, es despreciar a Jesus mismo. Y si se trata de salvación ¿cómo sería posible despreciar a Dios?
La salvación se recibe, Dios se recibe y nunca cesa de ofrecerse. Quien desprecia al hermano rechaza la salvación. No basta pronunciar el nombre de Dios o pertenecer en su pueblo para acogerlo, hay que entregarse a él, como los amantes, hay que amar a los demás, porque son hijos de Dios, pues hermanos nuestros.

15/08/2016

Siendo discipulos de Cristo, participamos en el fracaso de la muerte (Asunción)

Celebrando a María ¿qué hacemos? Celebramos a Jesús. No hay fiesta para nosotros, discípulos de Cristo, que no sea fiesta de Jesús. Pienso importante recordar esto, porque a veces, me parece que somos más Marianos que cristianos.
Celebrando la Asunción de María ¿qué hacemos? Celebramos a Jesús en su victoria sobre la muerte, la suya y la nuestra. Celebramos la resurrección del Señor, en la cual, María y nosotros encontramos el fracaso de la muerte. Si Dios es por nosotros ¿quién contra nosotros? ¿Quién nos separará del amor de Cristo? (Rm 8)
No hay en nuestra fe varias cosas que deberíamos creer, una lista, más o menos compleja. Creer no se hace con un catálogo de verdades que deberíamos confesar. Creer es ser discípulos de Cristo, solamente. No se trata de una verdad nocional, sino de una amistad o de una fraternidad. Creer es experimentarse como hermanos o amigos de Jesús: Mi madre y mis hermanos son los que oyen la palabra de Dios y la obedecen (Lc 8), y todavía, os llamo amigos míos (Jn 15).
No veneramos ahora a una mujer pero proclamamos nuestra esperanza ya realizada en ella. La victoria de Cristo sobre la muerte es también nuestro asunto. Ya es posible vivir con Cristo, escuchando su palabra, poniéndola en práctica, siendo hermanos y amigos suyos.
Estamos comprometidos en lo que celebramos. Celebrar la Asunción de María es seguir viviendo la vida de Jesús, ya aquí y ahora. Ya somos resucitados. ¿Lo vivimos? ¿Lo creemos?
No esperamos primero una vida después de esa, porque ya somos invitados a vivir esta vida con Jesús. ¿No es eso la resurrección, la vida eterna, vivir con Jesús? María no es primero la Madre de Jesús, pero representa la humanidad de la cual Jesús recibió su carne. La humanidad, y nosotros en ella, ya tenemos la oportunidad de vivir divinamente, como el Padre y su hijo Jesús, llenos del Espíritu santo.
El Espíritu da vida nueva a la carne, derramado sobre nosotros cuando Jesús entregó el Espíritu. No dice el evangelio que Jesús murió devolviendo su espíritu, sino que entregó el Espíritu. ¿A quien lo entregó sino a nosotros? ¿Y de qué espíritu se trata sino del Espíritu del Padre y del Hijo, que es Señor y dador de vida?
Así, si se puede decir ¡no celebramos a María, tampoco esperamos la vida futura! Estamos aquí porque intentamos ya vivir de la vida eterna, es decir la vida de Dios, es decir vivir divinamente. Estamos aquí porque vivir, para nosotros, significa intentar ser reflejo de la vida divina dentro de la vida y del mundo humano.
Inscribir la vida divina en el mundo es una manera de oponerse a la muerte. No, la muerte no tiene la última palabra. No, la muerte no reina, incluso si a menudo y de todas partes, se impone. Cada vez que la hacemos retroceder, dejando la fuerza del Espíritu de la vida actuar a través de nuestra carne, ya proclamamos la resurrección de Cristo, ya somos hermanos y amigos suyos, ya es la Asunción de la humanidad que ya vive la vida de Dios mismo. Creemos la resurrección de la carne.