28/11/2025

Combat à mort pour la vie (1er dimanche de l'avent)

 

 

Il est prévu, annoncé, prêché, un retour du Fils de l’homme. Le vocabulaire est tout sauf limpide mais codé, apocalyptique. Le catéchisme simplifie et dé-finit ce qu’il faudrait entendre, un retour de Jésus à la fin des temps. La fin des temps est aussi une expression codée et apocalyptique. Qui peut en avoir une idée puisque cela n’est jamais arrivé ? Suffit-il de la penser comme l’arrêt du temps ?

Pour Paul, la fin des temps, ce sont les temps, derniers, où nous sommes. Depuis la mort de Jésus, le temps est à sa fin. Pour l’évangile, le retour de Jésus n’est pas forcément une autre vie, après la mort, mais cette vie transfigurée en Royaume, (d’ores et déjà) au milieu de nous. La vie éternelle et la résurrection sont la personne même de Jésus. On réduit souvent l’eschatologie à une futurologie et je déconseille de s’aventurer sur ce terrain.

Les voyantes et autres divinations ont toujours fait recette. Et les chrétiens se contentent ordinairement d’un badigeon d’évangile, épousant la même logique au lieu de s’en détourner, de se retourner vers Jésus, de se convertir à Jésus. « Nous retrouverons après la mort ceux que nous avons aimés. » On se fait vertement reprocher un refus coupable d’espérance ou de consolation à ne pas avoir entonné ce refrain.

La confession de la résurrection de la chair ne dit rien qui ressemble à ce que nous vivons, mais l’impossibilité de réduire l’humain à son âme, son principe vital. Le corps nous constitue viscéralement ‑ c’est le cas de le dire. La confession de la vie éternelle ne dit rien de ce qui se passe après la mort de chacun. Elle exprime l’insurrection contre la mort. « Dieu n’a pas fait la mort. » Contre l’évidence que Heidegger formule de l’homme pour la mort, l’évangile est rébellion et emporte dans un relèvement : l’humain, malgré la mort, justement parce qu’il y a la mort, se révèle pour la vie. La confession de la communion des saints exprime qu’être humain c’est être un seul corps et que l’unité harmonieuse de la fraternité, symphonie de différences, est gloire de Dieu.

La proximité ou l’imminence du Royaume, son actualité même, est vécue par Jésus. Le dernier est prochain. En dernier recours, c’est maintenant. Ce que nous pensons de l’être de l’humain, c’est maintenant. Il n’y a pas de marge de manœuvre, on ne peut remettre à demain. Nous y sommes. Nous sommes dans le dur de ce qu’il nous faut faire et dire. Le dernier n’est pas l’épuisement d’une série, mais l’achèvement, la perfection de la création. « Tout est achevé. » Enfin, la création est menée à sa perfection, cieux nouveaux et terre nouvelle.

Le retour de Jésus, la parousie, pour parler comme les Grecs païens ‑ entrée solennelle d’un personnage important ‑ n’est pas un défilé planifié dont les musiques militaires manifestent qu’il n’est plus qu’à quelques mètres. Il vient comme un voleur, on ne peut prévoir, mais on peut s’y attendre. Il ne s’agit pas de vivre dans la peur mais de se tenir prêt. Ce qui signifie précisément vivre comme si le dernier, ce que l’on pense en dernier de l’humain, c’est maintenant. La révélation de l’humain, c’est maintenant.

Et plus c’est éminent, plus l’inhumain se déchaîne. Des hommes et des femmes n’ont rien à faire de l’humain, le détruisent même. Ils veulent pouvoir et argent, possession d’autrui. Ils veulent la gloire, être adorés ou craints, c’est la même chose, il n’y a qu’à lire les Ecritures. Ils ne veulent pas croire que vivre avec et pour les autres est gloire du corps entier, ils refusent de croire qu’il y a le corps, une fraternité. C’est cela croire.

Se tenir prêt, veiller, c’est croire qu’aujourd’hui, l’humain a pour vocation d’être lieu de Dieu, sanctuaire, sa demeure. Non un temple qu’on visite exceptionnellement et, le reste du temps, tuer et réduire l’être de l’humain à la mort. Se tenir prêt et veiller, c’est vouloir la vie, protégée comme la flamme d’une bougie contre les vents de la violence et de la haine. Veiller, c’est apocalyptique, combat à mort pour la vie.

La mort et la violence sont des catastrophes apocalyptiques, destruction de ce que l’humain révèle de vie. Etre prêt et veiller, révèle ce que l’humain recèle de vie ‑ pour être clair, employons les gros mots – divine, révèle l’humain comme gloire de Dieu.

 

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