19/01/2018

"Je crois l'Eglise une" (Semaine de prière pour l'unité des chrétiens)



L’Eglise qui devrait être signe de l’humanité réconciliée est divisée. Dans ces conditions, peut-elle accomplir sa mission ? Peut-elle être l’Eglise si elle n’est pas une ? On ne pourra sans doute pas aller jusqu’à dire que la division des chrétiens est la cause de la déchristianisation, mais il n’est pas contestable que les séparations, depuis les guerres de religion jusqu’à l’ignorance commune des uns par les autres, discréditent l’évangile même.
Que l’on s’oppose en traitant les autres d’hérétiques, se pensant uniques disciples authentiques, est source d’un scepticisme ou d’un relativisme qui ne peut qu’atteindre la vérité évangélique. Est-il possible qu’une Eglise confisque l’unité du Credo, je crois l’Eglise une ?
Il fallut des années pour que les séparations apparaissent scandaleuses au point de mettre en route un mouvement œcuménique, un souci de l’unité. Contre la volonté d’unité, certains, y compris des papes, préférèrent mettre en garde contre l’esprit mortel de la relativisation de la vérité. Pire, on continua à poser des définitions dogmatiques dont on savait qu’elles ne pourraient que rendre plus difficile l’unité. Les évêques espagnols dans leur très grande majorité s’opposèrent à la déclaration conciliaire de 1965 sur la liberté de conscience parce que rien n’empêcherait alors les protestants de se développer dans leur pays !
Aujourd’hui encore, plus de cinquante ans après le décret conciliaire sur l’unité, on continue à lire ici ou là, de la part de catholiques, un usage péjoratif du terme protestant. Ce sont nos frères, mais que surtout l’on ne pense pas comme eux !
Nous préférons encore la vérité à l’unité. Mais nous rendons-nous compte de la fumisterie de la chose ? Qu’est-ce que la vérité, si elle n’est pas partagée, commune ? Pire, comment peut-on penser que ce que l’on dit, y compris dans une Eglise, coïncide avec la vérité au point d’exclure du vrai tout ce qui serait différent de ce que cette Eglise enseigne ?
En toute bonne conscience, en toute certitude d’être dans la vérité, d’être orthodoxes, nos Eglises contreviennent au commandement du Seigneur. L’actuel pape semble mesurer la limite du chemin emprunté jusqu’à présent. Les théologiens ont travaillé et sont parvenus à de nombreuses possibilités de rapprochement. Ils butent aujourd’hui sur des sujets à propos desquels les évêques ne sont pas près de changer. François propose alors d’encourager tout ce que nous pouvons faire ensemble, notamment dans le service des autres, espérant que, nous connaissant, agissant ensemble, nous appréciant, il devienne évident que nous sommes unis, que nous ne pouvons plus nous satisfaire des divisions. Pas sûr que cela marche mieux !
La question me paraît être de savoir si nous pouvons continuer à penser qu’il manque quelque chose de décisif pour la foi dans toutes les autres Eglises. Nous pouvons ne pas partager certaines manières de faire, de penser, d’enseigner, de prier. Très bien, mais pensons-nous qu’il manque à toutes les Eglises quelque chose de décisif pour la foi ? quelque chose qui leur manque-plus qu’à nous ? Et si ce qui manquait surtout c’était l’unité, que nous pourrions nous offrir.
L’unité ne signifie pas le retour à une unique institution. L’histoire nous a formés en différentes théologies, différentes manières de prier, différentes manières de nous organiser. Nous ne saurions renoncer à cela sans appauvrir toutes les Eglises. Mais ne pouvons-nous pas reconnaître que nos Eglises, avec leurs limites, sont des lieux de l’authentique discipline du Christ et que partant, nous nous reconnaissons disciples authentiques de Jésus. Nos différences nous opposent moins qu’elles expriment la légitime et nécessaire diversité d’une unité des différences. L’unité est un acte pas un état ; l’unité se fait des différences, elle n’existe pas comme absence de différences.
A titre de comparaison, la diversité des spiritualités, des théologies, des communautés, religieuses ou diocésaines n’empêchent pas d’être unis dans une même Eglise catholique. Non que nous soyons tous et toujours d’accord entre nous, c’est rien de le dire, mais importe l’unité. Nous ne pourrions rien faire sans vivre en communion, même différents voire opposés. Sans quoi nous serions une secte !
Si les autres Eglises, ou pour le moins d’autres Eglises et communautés ecclésiales, permettent, aussi bien que notre Eglise catholique, d’être disciples, qu’attendons-nous pour en tirer les conséquences, reconnaître que nous sommes les uns avec les autres, les uns grâce aux autres, l’authentique Eglise du Christ qui reçoit son unité du Christ, une, non d’être uniforme mais unifiée, faite un.

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