C’est une sorte de fin de monde que nous vivons depuis un an. Ça craque partout, santé, écologie, économie, relations sociales, amicales et familiales. L’effondrement, le collapse semble pour demain. Surprenante actualité du prophète et du peuple qui marchait dans les ténèbres, les habitants du pays de l’ombre. L’apocalypse est-elle notre avenir ?
Il y a presque 2000 ans, l’auteur de l’Apocalypse n’annonçait aucun avenir ; il se contentait de décrire ce qu’il voyait. Et sa description est, elle aussi, d’une surprenante actualité. Quel Noël en ce temps d’apocalypse ? La pandémie nous aurait-elle volé Noël ?
Dans le monde, des hommes, des femmes, des enfants meurent de faim ; d’autres fuient leur pays en guerre ou dominés par les mafias. La Méditerranée est le cimetière de milliers d’entre eux. Pendant ce temps, Tartuffe a le teint frais et la bouche vermeille. Le pauvre homme : Que de tracas pour les riches qui doivent émigrer vers les paradis fiscaux. Les puissants se servent. Il n’est qu’à voir la fortune de la plupart des chefs d’Etat ! Les inégalités se creusent jusque dans notre pays. Pendant les confinements, certains d’entre nous ont épargné et d’autres, précaires, sont toujours plus nombreux à recourir aux banques alimentaires. Nos assemblées d’Eglise sont un des rares lieux où les uns et les autres se croisent, certes souvent en recouvrant d’un voile aussi pudique qu’hypocrite le sein de Dorine.
Ce n’est pas en fermant les yeux que la situation changera. Ce n’est pas parce qu’il fait nuit, qu’en fermant les yeux, nous ferons lever le jour !
Cette pandémie, la crise écologique, la crise sociale n’ont pas de sens : elles sont le déchaînement du mal. Reste à savoir ce que nous faisons maintenant, si nous changeons de comportement, ou si nous continuons « comme en 14 », la fleur au fusil, pour nous fracasser un peu plus dans la débâcle. L’auteur de l’Apocalypse quant à lui, dans la nuit de la violence et de la mort, percevait la victoire de la vie dans le combat contre le mal.
¨Passage depuis la mort jusqu’à la vie. A Paul qui parlait de résurrection, les Athéniens répondaient : « Nous t’entendrons sur ce sujet une autre fois. » J’espère que personne ne quittera cette église, scandalisé de ce qu’en une nuit de Noël on parle de résurrection.
Nous sommes venus adorer l’enfant de la crèche. Ne nous y trompons. Il ne s’agit pas d’une poupée ni d’un santon. Les Athéniens auraient de quoi rire. Nous jouerions à la poupée, nous nous prosternerions devant des santons, alors que bien sûr leur mythologie est foutaise.
Notre avenir est-il la mort, et n’avons-nous rien de mieux à faire qu’à tirer notre épingle du jeu ? C’est d’ailleurs ce que nous faisons. Certains pensent que pour s’en sortir, il faut jouer collectif. En sommes-nous ?
Dans la nuit de nos vies et du monde, Jésus est lumière. Nous avons vu son étoile et nous sommes venus l’adorer. La vie est devant, résurrection. La vie est devant, c’est pourquoi nous fêtons un nouveau-né. L’enfant de Bethléem est lumière qui se révèle aux nations, qui se lève sur le pays de l’ombre et les ténèbres où nous marchons. Il nous convie à mettre nos pas dans les siens. Noël d’apocalypse, révélation de l’issue du combat contre le mal.
Nous sommes attachés à l’enfant de la crèche. Pourtant, les santons font pâle figure. C’est que Jésus a les pauvres pour visage. Nous lui sommes attachés. Nous voulons et devons vivre comme lui : les autres en premier, les autres et lui d’abord, les pauvres d’abord. Si nous offrons des cadeaux, c’est que nous avons compris que pour vivre, c’est les autres d’abord. Notre participation à cette eucharistie pourrait-elle ne pas déclencher notre générosité ?
On n’est vivant qu’à « perdre sa vie ». Et même à la dilapider, la gaspiller. C’est ce qu’a fait Jésus, le prodigue du Père. Et nous ? Conserver jalousement notre vie est insensé. On s’enrichit à donner, et largement ; les autres d’abord. Qui garde sa vie la perdra. Fou que tu es, ce soir même on te demande ta vie !
On nous a rabâché, et nous avons peut-être répété, que la vie était ce qu’il y a de plus précieux. C’est pour cela que nous avons été confinés, que les personnes âgées ont été isolées, que nous nous sommes privés de ceux que nous aimons. Il convient certes de ne mettre personne en danger. Mais il n’est pas davantage possible de mesurer la vie à la survie que de vivre si les autres crèvent de pauvreté. Nous sommes des êtres de relation. Interdire ou refuser les relations pour défendre sa vie, c’est nourrir un affamé avec un pain empoisonné. Moment de vérité, noël d’apocalypse.
L’enfant de la crèche renverse la mort et dévoile notre avenir. Noël d’apocalypse si enfin nous ouvrons les yeux. La vie est devant, comme l’avenir du nouveau-né.
Prière universelle :
Seigneur Jésus, tu viens habiter nos Eglises pour qu’elles soient d’humbles servantes de ta parole, chant d’un matin de résurrection, lumière dans la nuit qui nous transit. Donne aux Eglises ton Esprit de sainteté.
Seigneur Jésus, tu viens habiter nos vies et tu les éclaires d’une lumière nouvelle. Ne nous laisse pas retourner en arrière, à ressasser nos ténèbres. Ouvre le cœur de tes disciples à l’avenir d’une vie que rien n’arrête.
Seigneur Jésus, tu viens habiter notre monde, avec ce qu’il a de plus beau, avec le mal aussi : la pandémie, la crise écologique, les injustices et les violences. Tu ouvres un avenir à ceux qui croient ne plus en avoir, tu renverses les barrières et les murs de la haine.
Seigneur Jésus, tu viens habiter nos rancœurs et nos préjugés et fais germer la paix et la réconciliation. Toi, le Prince de la paix, donne-nous de mettre nos pas dans les tiens.
Oui, encore une fois je trouve que vous trouvez les mots pour dire l'essentiel.
RépondreSupprimerMerci.
"psuchè" souffle de vie, âme. Qui veut le garder le perd! En ces temps où il nous est imposé de mettre un masque, le verset prend une coloration bien particulière et, peut-être, bien subversive! Question: "Jésus, soufflant sur ses amis après sa résurrection, avait-il un masque ?"
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