Petit exercice, en une page, dire ce qu'est être chrétien.
Depuis
bientôt 2000 ans, des hommes et des femmes se disent disciples de Jésus de
Nazareth. Cet homme « passait en faisant le bien » (Actes des Apôtres 10, 38). Les disciples
demeurent attachés à sa manière de vivre avec les autres, de mourir (Evangile de Marc 15, 39), de parler de
Dieu (Evangile de Luc 4, 36), d’être
homme pour les autres (Evangile de
Matthieu 20, 28), de s’effacer pour qu’ils soient premiers (ib., 19, 30),
d’aimer jusqu’au bout (Evangile de Jean
13, 1).
Ce
n’est pas un hasard si la parole de Jésus la plus connue est « Aimez-vous
les uns les autres comme je vous ai aimés » (Evangile de Jean 15, 12)
Après
sa mort par le supplice de la croix le 7 avril 30 (date la plus probable), ses
disciples le reconnurent vivant. Son corps déposé au tombeau et au vide s’est
relevé comme un corps de frères (Première
lettre de Paul aux Corinthiens 11, vers l’an 53). Plongés dans la mort et
la résurrection de Jésus, les baptisés sont membres de ce corps qu’anime l’Esprit
de Jésus.
Suivre
Jésus, cela voulut de suite dire choisir de vivre comme lui. L’un des titres les
plus anciens pour parler de Jésus est celui de messie, (qu’on traduit en grec
par Christ) ; dès les années 60 de notre ère, le nom de chrétien est donné
aux disciples (Actes des Apôtres 11,
26).
On a
fini par identifier le christianisme avec la civilisation de l’Europe. Cela
mène parfois à détester l’Eglise à cause de la violence des croyants (croisades,
inquisition, collusion du pouvoir et des clercs contre la liberté, etc.) ou
inversement à l’idolâtrer (les cathédrales, la culture, les hôpitaux et écoles,
etc.) L’Eglise est l’assemblée de pécheurs qui reçoit sa sainteté de Dieu. Sans
le Christ, elle n’a pas de sens.
Alors
que les actes criminels de prêtres sont révélés, on peut se demander comment
demeurer chrétien et catholique. Pourtant, l’urgence de l’amour du prochain, de
faire que tout homme puisse trouver en nous un prochain (Evangile de Luc 10, 36) est telle que la vie et la mort de Jésus, la Parole de Dieu,
demeurent une source indépassable de paix pour le monde et le sens de la
mission.
Jésus a
choisi de servir d’abord ceux qui sont exclus de la société (malades,
handicapés, étrangers, pauvres, prisonniers, etc.). Son rapport aux étrangers,
par exemple, interdit toute xénophobie ou ethnocentrisme. Etre disciples de
Jésus en Eglise est un engament politique, témoigner et agir dans la cité (polis en grec) parce que la fraternité
est le but de l’humanité. Si Dieu est le Père de tout homme, tous ne sont-ils
pas frères ? (Cf. Evangile de Matthieu 25, 31-46)
Les
chrétiens ne sont pas les seuls à vivre l’amour des frères, la charité, la
solidarité ou la sollicitude et nombre de chrétiens n’y sont guère fidèles. La
frontière entre chrétiens et non-chrétiens ne passe pas tant entre les
personnes qu’à l’intérieur de chacune. Assurer le service de la fraternité et
de l’amour « au nom de Jésus », « à cause de Jésus », c’est
reconnaître que tout n’est pas dit sur l’homme avec l’homme, qu’en l’homme il y
a une vie, une source de vie. Dieu se donne : il est créateur. « Prenez, ceci est mon corps, buvez, c'est mon sang. » (Evangile de Marc, 22 et 24)
Pour
parler de Dieu, c’est le vocabulaire de la relation et de l’amour qu’il faut
emprunter. Paul, moins de vingt ans après la mort de Jésus, tient ces drôles de
propos : « ce n’est plus moi qui vis, c’est le Christ qui vit en
moi » (Paul aux Galates 2, 20,
vers 55), « pour moi, vivre c’est le Christ » (Paul aux Philippiens 1, 21, vers 61). C’est ce
que disent les amants ! Pour moi, vivre, c’est elle, c’est lui. Prends,
c’est mon corps pour toi.
Cela
explique le sens de la prière. Non pas amadouer une divinité hostile ou obtenir
d’elle ce qui est inespéré, non un culte des morts, non pas non plus dire des
prières ou accomplir des rites, mais exister devant Dieu, avec et pour lui.
Cela ne relève pas de l’utilité et en ce sens ne sert à rien. C’est pure
gratuité, gracieux, selon la grâce. Les chrétiens sont les prophètes de cette
gratuité.
D'où l'avantage, la simplicité et la difficulté extrême d'aller à l'essence de l'essentiel...
RépondreSupprimerImpossible d'oser dire et même de penser : "je suis chrétien" quand bien même, depuis bientôt trois quarts de siècle, je tente de l'être, reconnaissant comme indépassable le message de Jésus le Christ.
Pour cette page et tant d'autres, merci Patrick !