Pour un mariage
Gn 1, 26-18 – Ps 62 –
Mt 25, 31-40
Pourquoi donc célébrer votre mariage à l’église,
sacramentellement ? La coutume et la tradition sur ce point ont de moins
en moins de poids. « Parce que nous avons la foi », répondriez-vous,
parce que l’un d’entre nous se dit chrétien et entraine l’autre dans sa
recherche de Dieu, ou, plus justement, relance par sa quête, celle de l’autre.
C’est déjà beaucoup dire. Devant tous, dire « je suis
chrétien, je suis disciple de Jésus », ce n’est pas une mince affaire. Avons-nous
bien entendu, nous autres ? La joie et la fête à laquelle vous nous
associez ne pourront pas faire passer au second plan le cran, humble et
déterminé, de dire : « je suis disciple de Jésus ».
Dans sa brièveté, cette confession de foi risque cependant
de ne pas dire grand-chose. Qu’est-ce que cela signifie, « je suis
chrétien, je suis disciple de Jésus » ? Il ne faudrait pas que l’on
s’imagine qu’être chrétien soit une identité, un repère identitaire, un
héritage familial ou social, des racines. « On ne naît pas chrétien, on le
devient. » Nous risquerions sinon d’être des chrétiens athées, je veux
dire des gens qui se disent chrétiens, mais pour lesquels, la suite du Christ,
la quête du Christ, ne signifierait concrètement rien du tout. Pouvons-nous
nous dire chrétiens si notre vie en rien ne se distingue de celles de nos amis,
qui ne professent pas la foi ou en professent une autre ?
La
question est difficile. Et l’évangile que vous nous avez proposé d’entendre à
l’instant pourrait bien nous inviter à répondre que non, rien ne distingue le
chrétien d’un autre, puisque, pour être disciples de Jésus, n’importe pas de le
connaître mais de toujours – chaque fois, dit le texte – voir, ne pas
détourner le regard, secourir « ces plus petits », « affamés ou assoiffés, étrangers ou nus, malades ou
prisonniers ».
Il
semble que ce qui fait de nous des personnes connues de Jésus, c’est notre
attitude envers les autres, à commencer par les plus petits. Et le texte
demeure actuel, car on n’en a toujours pas fini ; quel scandale qu’il y
ait encore des affamés ou assoiffés, étrangers ou nus, malades ou prisonniers.
Les migrations actuelles manifestent que « beaucoup sont dedans qui sont
dehors », comme disait saint Augustin, et « beaucoup dehors qui sont
dedans ». Si les chrétiens sont souvent en première ligne dans la défense
des droits des migrants, ils sont loin d’être unanimes sur l’accueil qu’on doit
leur réserver, quoi que dise le Pape.
Ainsi
donc, être du Christ est affaire de fraternité. Comment pourrions-nous être à
lui, « le frère universel », qui révèle pour tous les hommes un seul
Père, si nous méprisons un seul de ces petits qui sont les siens, si nous
excluons, tuons, laissons mourir le frère ?
Mais
alors, il ne vaudrait pas de connaître Jésus, seulement d’être connu de
lui ? Croire ne servirait à rien ? Peut-être faut-il s’interroger sur
ce qu’est connaître Jésus, ce que l’on appelle précisément croire. Non pas
savoir des trucs sur lui, mais le chercher, le quêter. « Je te cherche dès
l’aube, mon âme à soif de toi, après toi languit ma chair, altérée, sans
eau. » Nous autres disciples, sommes ceux qui essayons de faire de tout
notre vie, en chacun de ses instants, une quête du Dieu vivant. Et c’est à le quêter
que nous le découvrons. Jamais nous ne le connaissons parce que jamais nous
n’avons fini de le connaître, de le chercher, de le découvrir.
Croire
ne sert à rien, au sens d’une utilité. Croire relève de la gratuité, comme
l’amour, de la grâce. Qui prétend connaître son conjoint, son ami, ses enfants,
les menace : « Toi, je te connais ! » Nous sommes toujours
en quête de ceux que nous aimons. Nous n’en avons jamais fini de les découvrir
et c’est à les aimer qu’on les connaît. Dans la vie, on commence toujours par
aimer, ensuite on connaît, ou alors on prend l’autre, les autres, pour un objet
d’étude, algorithme, atome et matière, histoire, etc. On ne pourra alors s’étonner
de ne savoir reconnaître en l’autre un frère à vêtir, nourrir, visiter.
C’est
une seule et même histoire que celles de votre mariage, de votre amour, de la
foi, des textes que vous nous avez fait entendre, de l’invitation que vous nous
avez adressée, de nos vies. Une histoire commencée par, avec et dans l’amour de
Dieu. Ce commencement pour les disciples de Jésus n’est pas une histoire
ancienne, il y a si longtemps, ni une légende, quand bien même le texte est un
mythe. C’est aujourd’hui que cela commence. « Dieu créa l’homme à son
image, à l’image de Dieu il les créa, il les créa homme et femme. Et Dieu vit
tout ce qu’il avait fait. C’était très bon. »
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