Les évangiles de l’enfance que nous lisons depuis le 17
décembre et qui nous accompagneront pendant le temps de Noel ne sont pas à lire
comme un reportage et ne prétendent pas à la vérité historique. A partir d’un
événement historique, la naissance de Jésus, en actuelle Palestine, quelques
années avant notre ère, ils introduisent à la vie et aux paroles de Jésus.
Leur vérité réside dans ce qu’ils laissent deviner ce qui se joue avec
Jésus. Et comme le début est souvent synonyme de sens des choses, la naissance
d’un enfant permet de commencer l’annonce d’une bonne nouvelle : Dieu n’a
jamais cessé de se donner à l’humanité. En Jésus, ce don passe par l’assomption
d’une vie d’homme en vie divine.
« Voici que la Vierge concevra, et elle enfantera un fils ;
on lui donnera le nom d’Emmanuel, qui se traduit : "Dieu-avec-nous" ».
L’évangile ne sait comment raconter la scène, alors il cite les
Ecritures. Entre ma formule abstraite ‑ le don de Dieu comme assomption
d’une vie d’homme en vie divine ‑ et les propos du mythe de la vierge qui
enfante, mieux vaut encore la citation du prophète ! Dans tous les cas,
ces affirmations ne sont pas là pour être crues, mais pour tourner nos regards
vers celui que nous sommes appelés à croire, un Dieu qui tient parole, un Dieu
dont la parole est homme, un Dieu qui se tient au milieu de nous.
Nous ne sommes pas chrétiens à croire des trucs abracadabrantesques.
Nous ne croyons pas un Dieu qui s’est fait homme pour croire des incongruités
qui nous sortiraient de la réalité de notre histoire humaine. Etre chrétien, ce
n’est pas croire des choses étranges, curieuses, c’est croire une parole venue
de Dieu, c’est croire un homme, Jésus, et sa parole, s’en remettre à lui.
Et c’est exactement ce que raconte notre texte. Joseph, dans un
songe ‑ parce que ce qui se passe échappe à l’observation, à la
matérialité des faits ‑ Joseph fait confiance à une parole qu’il entend
dans le fond de sa conscience, la voix de sa conscience, qui n’est pourtant pas
sa voix à lui.
Joseph qui devant une femme enceinte à lui promise ne change rien à
la promesse, à la parole donnée, quoi qu’il en soit de l’arrangement de l’autre,
Marie, avec sa parole, avec sa promesse. Joseph qui, devant Dieu, manifestement,
demeure là où il est attendu : « ici je me tiens », « ici
je me tiendrai », parce que la vie m’a posé là, parce qu’être homme,
femme, c’est, dans les circonstances qui nous échoient, tâcher d’assurer :
« ici, je me tiens ».
Avec Joseph, c’est une histoire de fidélité, à Marie, à la parole
donnée, à lui-même, à Dieu. N’est-ce pas exactement ce que nous sommes invités
à vivre comme disciples. Tâcher de demeurer avec Dieu quelles que soient les
circonstances, c’est-à-dire, tâcher de demeurer avec les frères, quelles que
soient les circonstances.
Cette histoire n’a rien d’une fabulette. Elle raconte une manière d’exister
qui fait confiance à une parole qui a retenti dans la banalité des
circonstances, y compris violentes, un homme trompé. C’est une parole tenue qui
redresse une parole non tenue, fût-ce de la faute de Dieu. L’évangile s’ouvre par
une invitation à la confiance à une parole qui a retenti dans nos existences,
telles qu’elles sont, parole à laquelle nous avons su, un peu, si peu, prêter l’oreille.
Si nous voulons entendre une parole de Dieu en nos vies, n’allons
pas rêver, ne cherchons pas à être éblouis, à ressentir un truc extraordinaire.
Tout cela est mensonge. L’histoire de Joseph est un songe. L’évangile le dit on
ne peut plus explicitement. Si nous voulons entendre une parole de Dieu, il n’y
aura rien à entendre, mais il y a mieux encore.
A tâcher de tenir dans la fidélité à ce que nous avons à vivre dans
les circonstances qui nous échoient, s’ouvre une porte dans la nuit. La mort n’est
pas inéluctable. La haine ou la trahison ne sont pas les seules possibilités. Nous
le savons, la fidélité aux frères, la solidarité ou la charité, sont une crèche
où une parole prend naissance : le Seigneur sauve ‑ c’est le nom de
Jésus ‑ ; Dieu est avec nous ‑ c’est le nom de l’Emmanuel. L’amour
des frères est la crèche où la Parole prend naissance.
- François vient encore d’interpeller l’Eglise et l’humanité sur le
sort des migrants. Ne croyons pas que nous serons quittes à faire le dos rond
et à attendre que les cris du pape cessent. Il se tairait que les pierres
crieraient. Seigneur, soutiens ce vieux pape dans son engagement à réveiller
nos consciences.
- Il n’y avait pas de place pour toi dans la salle commune. Il n’y a
pas de place pour des millions de personnes de par le monde, ni dans leurs
pays, ni dans d’autres pays. Seigneur, nous t’en supplions, accompagne tous les
déracinés que notre incurie laisse sans protection. Nous pensons
particulièrement à la famille albanaise de Migennes.
- Pour les hommes et les femmes trompés, plus encore s’ils sont, si elles
sont battues, nous te prions. Tu t’es approché d’eux comme jamais en naissant
dans une drôle de famille.
- Alors que nous nous apprêtons à célébrer ta naissance, donne-nous
Seigneur, de vivre de ton amour pour aménager en nos vies des dizaines de
crèches, autant de lieu pour t’accueillir.
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