12/12/2013

Un colloque sur le catholicisme d'identité

Me parvient un appel à contributions pour un colloque d'historiens et sociologues des religions. Je le recopie ci-dessous. Il développe comme de coutume la problématique d'un colloque et pose des questions susceptibles d'êtres instruites par tel ou tel chercheur.
Ce papier m'inspire deux réflexions.
Premièrement, si le texte pose bien le problème, il relève me semble-t-il de la thèse. C'est légitime, restera à voir si le colloque valide ou infirme cette thèse.
Deuxièmement, je constate que l'on parle scientifiquement de catholiques d'identité, en face ou à côté des cathos de gauche, susceptibles d'être étudiés, décrits, positivement..Cela invite à resituer la nouvelle évangélisation, les communautés nouvelles comme l'Emmanuel, les défilés de la Manif pour tous dans un cadre militant qui n'est plus d'abord celui de l'engagement ou de la foi, mais de l'idéologie, à moins que la foi ne tienne lieu d'idéologie, ou ne soit réduite à une idéologie.
Intéressant....


Le catholicisme d’identité.
Approches historiques et sociologiques
Colloque organisé par Céline Béraud, Bruno Dumons et Frédéric Gugelot,
Jeudi 27 et vendredi 28 novembre 2014, à l’EHESS
Avec le soutien du CEIFR, du LARHRA et de l’IUF

Contrairement à l’image souvent monolithique qu’en donnent volontiers les médias, le catholicisme français est un monde pluriel. Pour appréhender cette pluralité, Philippe Portier a élaboré (2001) et précisé (2012) une typologie construite autour de deux pôles : celui de l’ouverture et celui de l’identité. Pour décrire le même phénomène, Jacques Lagroye (2006) a parlé du « régime des témoignages » et de celui « des certitudes ». Si les catholiques d’ouverture ont fait l’objet de travaux récents (Pelletier et Schlegel, 2012), les catholiques d’identité ont été encore peu étudiés (Baudouin et Portier, 2002 ; Landron, 2004). On ne dispose que de quelques recherches, déjà un peu anciennes, sur les communautés dites « nouvelles » (Hervieu-Léger et Champion et Hervieu-Léger, dir., 1990 ; Pina 2001), surtout d’ailleurs sur les charismatiques (l’Emmanuel, le Chemin neuf…) et moins sur les « réstitutionnistes » (Communauté Saint-Martin, frères de Saint-Jean, foyers de Charité…).
L’un des premiers objectifs du colloque consistera à interroger et à préciser la catégorie de  « catholicisme d’identité », en la confrontant notamment à d’autres, depuis plus longtemps constituées. Sera donc menée une réflexion sur les typologies employées mais également sur les conditions historiques d’émergence de ce catholicisme.
A cet égard, les années 1970 apparaissent comme un moment important. Ces années, celles de la « crise catholique » (Pelletier, 2002), constituent une référence repoussoir pour les générations plus jeunes, que l’on retrouve majoritairement dans le pôle de l’identité. Sans les avoir vécues personnellement, elles en font la source de la déprise catholique en France et développent un discours souvent très critique par rapport à leurs aînés. Surtout, dans le sillage du décret Ad Gentes (1965) sur l'activité missionnaire de l'Eglise, l’exhortation apostolique Evangelii nuntiandi (1975) pose déjà la question de la nécessité d’une annonce « explicite » de la « Bonne Nouvelle » et celle d’un « nouvel apostolat » pour défendre une foi « assiégée et combattue » par le « sécularisme » et l’« athéisme militant » et pour rejoindre les non-croyants et les non-pratiquants, en particulier ceux des pays de tradition chrétienne, en prêtant une attention particulière à la culture et aux médias. Si le colloque est principalement centré sur le catholicisme français, l’échelon romain devra donc bien sûr être pris en considération.
Les intervenant-e-s veilleront aussi à articuler leur propos aux changements en cours dans le catholicisme français depuis une quarantaine d’années. Il s’agira notamment de comprendre le basculement qui se produit dans les années 1980, marquées par un épuisement et un vieillissement des catholiques d’ouverture au profit de ceux qui se situent du côté de l’identité. Comment ces derniers ont-ils investi les lieux traditionnels d’exercice de l’autorité catholique (paroisses, diocèses, conférence épiscopale) ? De quels soutiens ont-ils bénéficié à Rome ? Pourquoi le second pôle est-il devenu plus attractif que le premier, tout particulièrement pour les jeunes ? Quels sont les liens avec le vieux courant intransigeant  (Poulat, 2007) ? Reste-t-il attaché à des formes d’intégralisme ? (Donegani, 1993 ; Fouilloux, 2008) ? Comment s’y pose la problématique du schisme intégriste?
Dans une perspective ethnographique, on s’intéressera aux modalités de socialisation et de communalisation que les réseaux qui relèvent du pôle de l’identité proposent à leurs membres (clercs et laïcs). On pourrait notamment étudier les formes de piété qu’ils ont contribué à revigorer : processions, adorations, chemins de croix dans l’espace urbain, etc. On montrera aussi comment y prédomine une logique d’entre-soi, tout à la fois chaleureuse et rassurante, caractéristique des groupements de convaincus. Au cours des activités religieuses mais également dans leur comportement dans le monde marqué par un « perfectionnisme moral », c’est un catholicisme de virtuoses (Weber, 1922) qui se donne à voir. S’ils affichent leur attachement à la norme romaine, ces fidèles n’en sont pas moins travaillés eux aussi par un processus d’individualisation. L’authenticité de l’engagement personnel librement choisi et la qualité des relations interpersonnelles tissées dans des réseaux ecclésiaux, subjectivement appréciée, peuvent primer sur l’obéissance diocésaine. La question de la (dé)régulation institutionnelle s’y pose donc autant qu’ailleurs.
Les catholiques d’identité, qui à tort ou à raison se pensent comme minoritaires, ont développé une nouvelle forme de présence au monde. Ils ont de fait rompu radicalement avec la stratégie d’enfouissement de leurs aînés et cultivent volontiers leur visibilité (importance accordée aux signes religieux, organisation de grands rassemblements dont les Journées Mondiales de la Jeunesse sont exemplaires…) dans une société sécularisée  qui, selon eux, les ignore voire les méprise. Apparaît ainsi l’affinité de ces catholiques avec la démocratie des identités (Gauchet, 1998), travaillée par des luttes pour la reconnaissance (Honneth, 1992).
Ces catholiques virtuoses ne sont pas seulement des pratiquants mais également des militants, dont l’engagement s’est déployé dans l’espace public et le réinvestissement du politique. On s’intéressera aux principaux champs d’intervention qui sont les leurs (bioéthique, famille, genre, culture, caritatif et humanitaire…) ainsi qu’à leur répertoire d’actions (manifestations, pétitions, blogs, réseaux sociaux, lobbying parlementaire, savoir-faire événementiel…).
Enfin, on pourra s’interroger sur les effets de cette réaffirmation identitaire catholique dans les relations aux autres groupes religieux. Repli confessionnel et donc refroidissement de l’œcuménisme ? Quelle place dans le paysage religieux lui aussi pluriel ?

Les propositions de communications (titre et résumé de 3000 signes maximum, espaces compris, avec le nom, le statut et l’institution de rattachement de leur auteur-e) devront être adressées avant le 25 janvier 2014 

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