Nous sommes venus à la messe pour Noël, c’est donc que nous
nous reconnaissons comme chrétiens. Peut-être ne sommes-nous pas toujours d’accord
avec l’Eglise. Malgré cela, nous sommes ici parce que nous croyons que dans
notre monde, dans nos familles, au travail, avec les amis, dans nos vies, un
peu de l’évangile, c’est indispensable, un peu d’amour du prochain jusqu’au
renoncement à soi est le seul chemin du bonheur et de la paix.
Rien d’extraordinaire là-dedans. Vous le vivez, parents,
lorsque les enfants passent avant vous. Et vous en êtes heureux, même si
parfois, c’est dur. Vous le vivez en couple, lorsque vous laissez passer votre
conjoint avant vous, et vous êtes heureux, même si c’est parfois dur. Vous le
savez aussi, vous, les enfants : si l’on n’accepte pas que l’autre passe
devant, ça va vite se disputer, se bagarrer. Depuis le jouet que l’on prête
jusqu’aux renoncements financiers ou autres, nous avons tous cette expérience.
La vie exige un peu d’évangile si l’on ne veut pas la guerre, laisser passer l’autre
devant, être serviteur dit Jésus.
Nous disons souvent qu’être chrétiens, c’est partager des
valeurs. Or nombre de ceux qui ne croient pas en Dieu, que nous connaissons
bien, partagent les mêmes valeurs, pardon, amour, tolérance. Non, si nous
sommes chrétiens, c’est parce que nous pensons que faire comme Jésus est le
seul chemin pour vivre ensemble. Et nous en avons déjà l’expérience.
Vous direz que d’autres font de même sans se revendiquer de
Jésus, qu’ils acceptent de laisser la première place. C’est aussi décisif pour
la fraternité. Mais puisque nous sommes chrétiens, nous voulons non seulement
la fraternité, mais nous la voulons comme ou « à cause de Jésus ». Nous
voulons comme Jésus construire un monde de paix, choisir la fraternité, en
servant plutôt qu’à être servis. Ne pensez-vous pas que notre société en a
grand besoin ?
Comment, alors que nous, chrétiens, sommes en minorité, à l’école,
au boulot et même parfois en famille, pouvons-nous contribuer à la fraternité à
cause de Jésus ? Oh, je ne dis pas que nous allons réussir à ce que tout
aille bien ; « pour les hommes, c’est impossible », surtout si y
va chacun de son côté. Certains Gilets Jaunes ont exprimé leur souffrance
devant le manque d’estime, une implosion de la société en outre faute de fraternité ?
Trop de nos concitoyens, trop d’entre nous, sans parler de ceux dont personnes
n’a parlé ces semaines ‑ immigrés, Sdf, quart monde ‑ ne comptent pour
personne. Exactement ce qui se passe dans une cour de récréation lorsque
personne ne veut jouer avec l’un des enfants et le laisse s’ennuyer triste dans
son coin. Il y a des gens qui n’ont pas le droit de jouer, ou ne le peuvent, parce
qu’ils ne savent pas se débrouiller dans notre société complexe et mondialisée.
Nous, chrétiens, à la suite de Jésus, nous avons une
mission. Oh, nous n’allons pas tous nous transformer en religieuses ou
catéchistes. Non. Mais là où nous sommes, dans les situations où nous amène la
vie, comment être au service d’un monde fraternel ? Voyez, on s’en fiche
que Jésus soit né, si cela ne nous pousse pas à faire comme lui. Pire, nous trahissons
Jésus à fêter sa naissance tout en refusant de faire comme lui. C’est sûr, on ne
va pas toujours réussir à vivre comme lui, mais premièrement, nous le faisons
déjà un peu, et deuxièmement, nous devons nous remuer pour une société en manque
de fraternité.
Oui, nous sommes minoritaires, les enfants à l’école, comme les
adultes dans leurs lieux de vie, mais avant qu’il n’y ait plus de chrétiens, il
y a urgence à se retrousser les manches, à être missionnaires. Non partir au
loin pour annoncer l’évangile ni se faire prosélytes et n’avoir que Jésus à la
bouche, mais se bouger pour la fraternité et la paix là où nous vivons, pour la
fraternité au nom de Jésus ; non convertir les autres, mais participer à
la fraternité, la susciter à la suite de Jésus. Notre monde en a tant besoin,
notre société.
Si Jésus se fait homme, vit en ce monde, c’est pour être un
frère en humanité, c’est pour dire que reconnaître en Dieu le père de tous les
hommes, c’est accueillir la fraternité qui sauve le monde. Ce n’est pas pour
rien qu’il s’appelle Jésus, Dieu sauve.
Puis-je nous lancer un défi ? Jésus ne sait pas parler,
comme un bébé qui vient de naître ; j’ose me faire son interprète. Comme
dit le Pape, soyons disciples missionnaires. En termes moins techniques, comment
nous organisons-nous ensemble pour construire la paix et la fraternité « à
cause de Jésus ? » Notre Eglise embauche, notre paroisse embauche. Notre
évêque nous invite à la fraternité. Qui accepte de se retrousser les manches ?
C’est Noël chaque fois qu’il y a une trêve dans les conflits et le mépris, au
nom de Jésus, ou au nom de la fraternité. Même minoritaires, Jésus et le monde
comptent sur nous. Faites comme Dieu, devenez humains, fraternels.
L’une des plus belles reflexions jamais entendues. À mettre en pratique.
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