28/07/2023

Ecouter qui est Dieu Mt 13, 44-52 (17ème dimanche du temps)

St Benoît - Écoute 

 Terre cuite de Fr. Antoine Gélineau (Tamié)

 

Trois brèves paraboles, plutôt des dessins de presse que des histoires, pour parler du Royaume des cieux. Chaque fois, comme déjà précédemment, il s’agit de dire ce que nous ne connaissons pas, le Royaume.

Pourtant, si l’on demande aux catéchistes, aux prêtres ou théologiens, aux chrétiens, ce qu’est le Royaume, ils auront une réponse. Comme s’ils en savaient plus que l’évangile lui-même, que Jésus même ! Le Royaume demeure inconnu, caché comme dit Eloi Leclerc. Il n’est ni un lieu, ni un temps, ni un état à venir. Il est une manière de désigner Dieu. On ne parle pas de Dieu, on ne devrait pas parler de Dieu. Comment en parler comme du reste, petits fours de l’apéritif tout à l’heure ou outils, œuvres d’art ou personnes que nous côtoyons.

C’est salir son nom que de le prononcer, et l’on usera de mille détours : une fois l’ange du Seigneur, une fois sa présence ou sa sainteté, une fois les cieux ou le Royaume. Et Matthieu pousse jusqu’au bout le silence qui dit Dieu ne parlant pas du Royaume de Dieu, mais du Royaume des cieux.

Nous voilà bien avancés ! Car nous ne savons pas plus ce qu’est Dieu que le Royaume. Nous ne savons pas ce que nous disons lorsque nous disons Dieu. A preuve que le mot recouvre le meilleur et le pire, qu’il y a nécessité à faire le tri, comme avec le filet de pêche puisque, avec dieu, on peut aimer ou tuer, faire grandir ou détruire. Nous les connaissons les ayatollahs, y compris dans le catholicisme, qui ferment les portes du Royaume, lient de pesants fardeaux qu’ils ne remuent pas du doigt. Nous devrions sursauter, disjoncter, à exclure au nom de la vérité de l’évangile, de la splendeur de la vérité. Qu’est la vérité sans l’amour ? Veritatem facientes in caritate. « Amour et vérité se rencontrent, justice et paix s’embrassent » cantile le psaume.

Puisque la charité, l’amour, ne nous caractérise pas plus que cela ‑ cela se saurait ‑ il est urgent de ne rien savoir sur Dieu, histoire de nous assurer que nous ne sommes pas en train de rendre un culte au démon. Si le chapitre des paraboles du Royaume insiste tant sur le fait qu’il ne suffit pas d’avoir des oreilles pour entendre ni des yeux pour voir, qu’il faut être attentifs aux choses cachées, ce n’est pas pour rien. Ce qu’est le Royaume, qui est Dieu, n’est accessible que dans la conversion, l’ascèse de l’amour. C’est que l’on ne parle pas de Dieu ‑ nulle part il ne s’agit de cela dans ce chapitre ‑ mais seulement d’écouter.

Si le Royaume c’est Dieu ‑ et c’est bien ainsi que nous lisons la parabole du semeur, c’est Dieu qui sème ‑ alors Dieu est aussi le négociant en perles rares. Pour un trésor il vend tout, renonce à tout. A quoi donc renonce-t-il, et quel est ce trésor ou cette perle ?

Chacun, chacune, nous sommes le trésor du Seigneur, non pas indépendamment des autres, mais avec les autres. Son trésor, c’est la création tout entière, celle que Jésus récapitule comme disent Paul et Irénée, dont l’humanité à l’image et ressemblance dit tout le prix.

Mais qu’est un négociant qui n’aurait plus qu’une perle, la plus rare, à avoir vendu toutes les autres pour acheter celle-là ? Il est fou, il n’est pas raisonnable, il agit sur un coup de tête. Nous n’avons pas une parabole de la vie économique, mais une désignation de Dieu, et Dieu ne sait pas compter selon le mot de Jean-Noël Bezançon.

Dans tout ce chapitre, Dieu se dit par une action (ou une personne, homme ou femme, en action, ou une plante qui pousse, du levain qui fait lever la pâte). Faut-il penser Dieu comme une personne ou comme une énergie, une force vitale, celle de la croissance, non comme le veulent les économistes pour avoir plus, mais pour être en plénitude ? Les paraboles parlent de la nature qui pousse, croissance, jaillissement et de l’invisible levain.

Nous lisons la parabole qui ouvre le chapitre selon les terrains et l’exigence qui nous serait faite d’être bonne terre. Il est urgent de penser Dieu comme le semeur qui en met partout, excès de générosité, aussi nul que soit le terrain (lui, ne réserve pas l’eucharistie à ceux seuls qui respectent la loi de l’Eglise !). Il ne sème que le bon grain (et non la zizanie, mais qui pourrait semer autre que bon ?). Il est prêt à tout lâcher pour nous (sa richesse y compris, sa gloire y compris), nous accueillant comme le buisson les volées d’oiseaux du ciel.

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