La conférence sur le climat de Glasgow à peine achevée, demeurent les menaces sur la planète. « Après une grande détresse, le soleil s’obscurcira et la lune ne donnera plus sa clarté ; les étoiles tomberont du ciel, et les puissances célestes seront ébranlées. » (Mc 13, 24-32) Le niveau des océans augmentera au point d’engloutir bien des cités et des champs. Les populations fuiront se protéger sur les terres élevées et les guères s’ensuivront. Les habitants de ces terres ne voudront pas partager leurs biens. Des myriades de personnes quitteront leur pays et ne seront nulles part accueillies.
Nous y sommes. L’apocalypse, la fin des temps, c’est maintenant. Et que faisons-nous ? Nous continuons comme si rien n’était. Les migrants meurent en mer, coincés aux frontières, en Grèce, en Biélorussie, à Calais, à Ceuta.
Que faisons-nous ? Rien. Pour nous, jusque-là, tout va bien. Pourquoi faudrait-il changer ? Ce qui change peut-être c’est que notre cynisme ou notre surdité, l’incapacité ou l’impassibilité à voir les autres mourir éclatent au grand jour. Même nos enfants et petits-enfants, nous n’en avons finalement rien à faire. Qu’avons-nous changé de nos modes de consommation et de pollution ?
Pouvons-nous seulement, dans ces conditions, continuer notre célébration ? N’est-elle pas sacrilège ? Ne rajoute-t-elle pas l’hypocrisie, la mauvaise foi à notre crime ?
L’imminence de la catastrophe n’est pas nouvelle, même si sa forme l’est. La catastrophe prend figure de fin parce que l’on ne voit pas comment en sortir, parce que l’on va droit dans le mur pour s’y fracasser.
Cependant le monde de l’évangile a toujours été celui de la fin, parce que l’évangile est de ceux qui mettent en évidence la catastrophe. Lorsque vous faites de l’amour, de l’amour de Dieu, l’axe autour duquel tout devrait se déployer, vous percevez que la fin est proche, que les temps que nous vivons sont les derniers. « A bien des reprises et de bien des manières, Dieu, dans le passé, a parlé à nos pères par les prophètes ; mais à la fin, en ces jours où nous sommes, il nous a parlé par son Fils qu’il a établi héritier de toutes choses et par qui il a créé les mondes. » (He 1, 1-2)
Vivre l’évangile, c’est forcément être projeté à la fin des temps, interpréter les temps comme les derniers, parce que tout ce qui est pâlit, perd de sa pertinence. Qu’est-ce qui fait sens si Dieu habite ici ? Comment ce monde est possible tel qu’il est si Dieu l’habite ? « Vous, lorsque vous verrez arriver cela, sachez que le Fils de l’homme est proche, à votre porte. » C’est la confession chrétienne ; Dieu n’habite pas les palais inaccessibles, mais les lieux de souffrance, parce que c’est là qu’il y a urgence à rendre la vie.
Rien des menaces climatiques ni des périls de la migration pour les migrants eux-mêmes, rien des violences y compris dans l’Eglise ni des massacres d’enfants de par le monde ne peut être relativisé sous prétexte que Dieu est là, tout proche. Au contraire, l’horreur du mal n’en est que davantage dénoncé. Une partie de la réponse est entre nos bras, dans nos richesses partagées, dans notre souci de prodiguer, sans cesse un peu de bonté.
Notre célébration nous ouvrira-t-elle les yeux ? Elle n’est pas là pour nous consoler et nous rassurer, mol édredon d’un sommeil coupable et insouciant. Au cœur de nos détresses, elle est l’annonce encore et toujours, de la présence du Seigneur. Dieu, contrairement aux dirigeants de la Cop 26 ne fait pas mine de ne rien voir quand le monde est en feu ; contrairement aux épiscopats mondiaux, Dieu ne détourne pas son regard des enfants blessés ; contrairement à l’opinion publique, Dieu ne referme le journal quand il arrive à la page où sont racontées les horreurs de la migration, Biélorussie, Grèce, Libye, Calais et Manche.
Notre célébration nous donne de proclamer que le Seigneur est tout proche et même que nous le touchons de nos mains, le voyons de nos yeux, l’entendons de nos oreilles. Il a faim et nous le nourrissons, ou pas. Il a soif et nous lui donnons à boire, ou pas. Il est étranger, et nous l’accueillons ou pas. Il est nu et nous l’habillons, ou pas. Il est malade ou en prison et nous allons jusqu’à lui, ou pas. Chaque fois que nous retardé les catastrophes, c'est le temps de la révélation. Apocalypse now : « Vous, lorsque vous verrez arriver cela, sachez que le Fils de l’homme est proche, à votre porte. »
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