30/11/2018

A ceux qui sont usés par la mission

En réponse aux (qui dit aussi en responsabilité des) prêtres fatigués sur le chemin de la mission.

1. La mission n'a jamais été chose (uniquement) facile et réconfortante. Jésus pleure sur Jérusalem, regarde l'homme riche s'en aller.
2. Dans la société qui est la nôtre, qui s'étonnera que nous croisions des gens qui n'ont pas la foi ? Heureux, je dis bien heureux, ceux dont le ministère les met en contact avec le plus de monde possible.
3. Peut-être que poser le regard d'amour sur les gens, comme Jésus avec l'homme riche, une nouvelle fois, pourrait changer notre propre jugement sur notre propre action pastorale. Aimer les gens, cela change une vie au point de la rendre heureuse dans les adversités mêmes.
4.Aimer, c'est gratuit. Aimer, cela appauvrit (surtout quand on n'invite pas les amis et la famille, les gens qui croient comme nous, qui pourraient nous inviter en retour.) Ce chemin de la gratuité, de la grâce, creuse l'immensité du manque de Dieu, à en crever. "A la mesure sans mesure de ton immensité, tu nous manques Seigneur. Dans le tréfonds de notre cœur, ta place reste marquée comme un grand vide, une blessure".
5. A force de répéter que la foi est joie, jusqu'au Pape, faut pas s'étonner que ça nous retombe sur le coin de la figure. Pour qui la vie est joie ? Pas tant de monde que cela. Je pense à ceux qui accompagnent leur conjoint ou un enfant dans une maladie qui conduit à la mort, je pense aux Yémen, je pense à tant de chrétiens qui ont luté sur le chemin de la vie parfaite. Comment serions-nous dans la joie quand ceux que le Christ nous a donné à aimer sont broyés par le mal ? Nous ne sommes pas chrétiens pour être heureux, mais pour servir, pour aimer à la suite de Jésus. Si le bonheur est là, profitons-en ; le reste du temps, nous voulons croire, oui, comme la petite Thérèse, nous voulons croire que Jésus est dans la barque.

PS
Les prêtres comme les chrétiens sont marqués par la société et la culture de la réussite. Les communautés nouvelles à qui tout pourrait sembler réussir surfent sur cette vague (la nouveauté est toujours gracile, sauf pour le vilain petit canard, exception qui confirme la règle). Un lecteur de l'évangile devrait se méfier de cela. "On vous dira : "Le voilà ! " "Le voici ! " N'y allez pas, n'y courez pas"."
"Cherchez d'abord son Royaume et sa justice, et tout cela vous sera donné par surcroît." (Il faut relire le contexte. Il se pourrait que la joie, entendue telle que nous le pouvons dans le contexte et la société contemporains, relève d'une préoccupation de païens, comme dit le texte.)
Si Jésus avait cherché sa réussite, il n'aurait pas fini en croix comme un criminel ; sans doute, on ne parlerait plus de lui.
Quand on dit qu'on a renoncé à tout, premièrement je n'y crois pas parce que ce n'est pas vrai, ou exceptionnellement, il ne suffit pas d'accepter le célibat au nom du Royaume pour avoir tout donné, deuxièmement, ce à quoi il importe de renoncer, c'est à nos rêves de réussite. "La coupe que je vais boire, vous y boirez." Et nous ne serions pas heureux ?
A lire les textes liturgiques de ces jours, qui peut dire qu'il n'était pas prévenu ? L'être disciple n'y est pas vraiment présenté comme un jardin des délices, que ce soit dans l'Apocalypse de Jean ou en Luc 21.

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