Un certain nombre de catholiques français, qu’il ne faut pas confondre avec l’Église catholique qui est en France, sont, sans le savoir, fidèles à une tradition qui vient de très loin, bien avant la Révolution française. Ils se laissent déterminer de l’extérieur, par ce que le général de Gaulle appelait les « circonstances » de la vie politique. Ils sont pris dans des rapports de force qui leur échappent, mais en fonction desquels ils rêvent d’affirmer leur identité, de façon militante, soit en se défendant contre ceux qui les contestent, soit en participant à des manœuvres offensives, espérant retrouver ainsi des positions dominantes dans notre société.
Cette posture militante, cette culture de combat n’est pas nouvelle. Elle correspond à cette longue tradition qu’Émile Poulat, René Rémond et bien d’autres historiens ont désignée comme celle du catholicisme intransigeant qui s’est développée tout au long du XIXe siècle, pour résister à tous ceux qui semblaient hostiles à l’autorité de l’Église. Cette interminable guerre des deux France s’appuyait sur des idéologies consistantes, d’un côté celle qui inspirait le parti clérical, et de l’autre celle qui accompagnait la naissance et l’affirmation du projet laïque.
On peut toujours rêver de réveiller ces vieilles querelles, en invoquant d’un côté le programme de l’Action française de Charles Maurras et de l’autre les réalisations de Jules Ferry ou les idées de Ferdinand Buisson, sans parler de la rivalité entre les curés et les instituteurs. Mais c’est peine perdue. Parce que les idéologies qui soutenaient ces projets politiques sont mortes et que personne ne peut les ressusciter, à moins de faire le choix, du côté catholique, d’un enfermement dans des réseaux serrés qui se réclameraient d’une foi pure et dure et, du côté laïque, de la remise en valeur d’une morale fondée sur des valeurs abstraites.
Mais il faut être réaliste : certains, qui se méfient des religions, doivent se réjouir en sourdine de voir que la figure du catholicisme semble aujourd’hui se confondre avec ce courant offensif. Quelle aubaine pour eux de dénoncer ces durcissements qui se produisent sur la place publique ! Comme il serait facile d’assimiler l’Église tout entière à ces expressions musclées de la foi ! Quel triomphe si l’on parvenait à montrer que les croyants sont tous des violents et des obscurantistes ! Si les ultras devaient l’emporter chez les catholiques, alors la voie serait libre pour les ultras anticatholiques, trop heureux de relever alors le défi qui leur serait lancé !
Il est donc urgent de raison garder et de remettre les réalités dans une perspective historique. Les affrontements qui accompagnent le projet de loi destiné à ouvrir le mariage et l’adoption aux couples de même sexe ne sont qu’un épisode révélateur de la crise du mariage et de l’effacement des valeurs communes qui fondaient notre société. Mais faut-il se résigner à ces explosions d’individualisme militant qui valent aussi pour des jeunes catholiques ? L’urgence est plutôt de lutter contre tout ce qui déshumanise notre société, contre tout ce qui envenime les pauvretés muettes, contre tous ces processus qui réduisent les personnes à des objets manipulables selon les exigences exclusives de la rentabilité financière ou technique, en tous domaines.
Quant aux responsables de l’Église catholique en France, dont je suis solidaire, ils seraient mal inspirés s’ils cherchaient à prendre en marche le train des poussées politiques, en essayant de faire plaisir aux ultras et aux autres. Si cet opportunisme l’emportait, il faudrait en payer le prix dans quelques années. Je suis préoccupé, parce que j’ai parfois l’impression que la joie provoquée par l’élection du pape François est estompée par les crispations actuelles et que la référence à la simplicité et à la force de l’Évangile s’atténue ! Que diable, si l’on peut dire, allons-nous renoncer à nous déterminer de l’intérieur de notre foi catholique et de l’espérance que nous mettons dans la miséricorde du Christ ? Ce n’est pas de calculs politiques que nous avons besoin, c’est du courage d’être nous-mêmes, des disciples et des témoins de Celui qui est venu pour « chercher et sauver ce qui était perdu » (Luc 19, 10) et aussi pour « réunir les enfants de Dieu dispersés » (Jean 11,52).
Mgr Claude DAGENS, évêque d’Angoulême, de l’Académie française
La Croix 21 avril 2013
La Croix 21 avril 2013
Hé bien pour ma part, je ne suis pas d'accord avec l'analyse de Mgr Dagens. Je crois qu'il est a côté de la réalité du mouvement encouragé par les cardinaux Vingt-trois et Barbarin. A-t-il eu un contact direct avec la manifestation en cours, où se contente-t-il d'informations de seconde main ? (ex : journal le monde).
RépondreSupprimer1) On ne déplore pas de violence, ni d'homophobie, ni d'aigreur au sein de la manif pour tous.
2) Celle-ci ne cherche pas à s'identifier avec l'église, tout comme l'église catholique ne cherche pas à s'identifier à elle.
3) les responsables du mouvement ont tout fait pour se distinguer des mouvements Civitas, Action française, et de la même manière, il ont tout fait pour ne pas être récupéré par un parti politique, quel qu'il soit (interdiction des bandroles et affiches en faveur d'un parti). En revanche, il est habituel et inévitable que ce type de mouvement tente de surfer sur la vague. Il semble bien que dans le camp adverse, on ait tout intérêt à les assimiler et à grossir l'importance des incidents générés par ces marges.
4) S'agissant du mariage, il me semble que l'église en s'imiscant dans le débat est tout à fait dans son rôle :
cf Gaudium et Spes n° 76 : "Certes, les choses d'ici-bas et celles qui, dans la condition humaine, dépassent ce monde, sont étroitement liées, et l'Eglise elle-même se sert d'instruments temporels dans la mesure où sa propre mission le demande. Mais elle ne place pas son espoir dans les privilèges offerts par le pouvoir civil. Bien plus, elle renoncera à l'exercice de certains droits légitimement acquis, s'il est reconnu que leur usage peut faire douter de la pureté de son témoignage ou si des circonstances nouvelles exigent d'autres dispositions. Mais il est juste qu'elle puisse partout et toujours prêcher la foi avec une authentique liberté, enseigner sa doctrine sur la société, accomplir sans entraves sa mission parmi les hommes, porter un jugement moral, même en des matières qui touchent le domaine politique, quand les droits fondamentaux de la personne ou le salut des âmes l'exigent, en utilisant tous les moyens, et ceux-là seulement, qui sont conformes à l'Evangile et en harmonie avec le bien de tous, selon la diversité des temps et des situations."
est-ce que le sujet ne toucherait pas les droits fondamentaux de l'enfant, et le salut des âmes : à travers la modification du mariage, c'est une vision de l'Homme et notre projet de société qui me semble modifié.
f. Pierre-Adrien
Pierre,
SupprimerJe ne sais pas si tu as lu le même article de Mgr Dagens que moi. Je ne sais pas non plus quels journaux tu lis. Mais manifestement pas les mêmes que moi.
1. On ne déplore pas de violences dis-tu. C’est faux. Le Cardinal Vingt-Trois lui-même dans son discours de clôture de la dernière Assemblée plénière y fait allusion. Tu diras que l’Eglise n’est pour rien là-dedans, et que ce sont des débordements. Je me permets de contester. La parole contre les homosexuels, quoiqu’on en dise, a créé un sentiment qui justifie que l’on se lâche, en parle et parfois aussi avec les poings (Cf. les agressions homophobes de ces derniers jours). Les évêques n’ont pas joué le jeu de la discussion qu’ils réclamaient pourtant, notamment au sein des communautés. Plus encore, le discours d’ouverture de la dernière Assemblée par le Cardinal Vingt-Trois était manifestement intolérable au point que le ton a substantiellement changé en deux jours.
2. Ceux qui manifestent ne sont pas l’Eglise. Ici, tu dis exactement ce que dit Mgr Dagens. Du coup, tu es d’accord avec lui, au moins sur ce point.
Je m’en réjouis, figure-toi. Car dans les chrétiens que je rencontre, beaucoup ne comprennent même pas que l’on puisse ne pas inviter les paroissiens à aller manifester ! Je m’en réjouis encore, parce que cela laisse entendre, qu’il y aurait place dans l’Eglise pour une autre position que celle que l’on devrait évidemment avoir.
3. Se distinguer de Civitas ne mange pas de pain. Mais dis-moi, es-tu sûr que le Salopn Beige, que le Printemps Français, que Ichtus, ce ne soit pas la Catholicisme intransigeant ? Et les Veilleurs (du champ de mars) ? Et le quarteron d’évêques (Toulon, Avignon, Luçon et Bayonne) ? Tu le sais, ici, sauf à être dans le déni, il ne suffit pas d’affirmer, il faut prouver. Eh bien, j’attends que tu me montre que le cher Monseigneur de Bayonne n’est pas un intransigeant, par exemple. Faut arrêter de prendre les gens pour des imbéciles. Mgr Aillet est allé soutenir les Veilleurs.
4. Crois-tu que Mgr Dagens ne signerait pas le texte de GS que tu cites ? J’ai du mal à le penser. Vois-tu quelque chose dans son texte qui l’indiquerait ? L’Eglise a son mot à dire, c’est évident, et je l’ai écrit aussi (sur ce blog L’Eglise devrait-elle se taire ?).
Tu as raison, ce projet de loi touche la vie familiale qui est constitutive de la vie en société. La question, comme je l’ai déjà souvent écrit est celle de ce que signifie l’homosexualité. Est-elle acceptable qu’à une condition, être cachée ou au moins discrète ? Dès lors qu’elle n’est plus un délit (voire un crime) ni une maladie, qu’est-ce qui justifie qu’elle n’ait pas la possibilité d’être une sexualité minoritaire, sur laquelle aussi peut s’édifier le lien social. Je n’ai vu personne répondre à cette question sauf à répéter que les homos nient l’altérité. Dans ce cas, on en fait des handicapés de l’altérité. Cette thèse ne me semble pas résister ni aux faits, ni à la réflexion.
L’Eglise devait prendre la parole, mais elle l’a prise stupidement, en ces responsables. C’est bien l’idéologie de la droite catholique qui a parlé, et non l’évangile. (Sans parler d’hypocrisie, puisque statistiquement au moins, il doit y avoir quelques homos parmi les évêques ! Tu me diras, on peut être homos sans être pour le mariage gay, mais alors c’est justement cela qu’il aurait fallu dire, le sens de la sexualité homo).
Voilà, cher Pierre, j’ai repris des arguments avec respect et précision, et ne vois pas bien comment tu peux justifier ton affirmation de début selon laquelle tu n’es pas d’accord avec Mgr Dagens. Ce que tu lui reproches, c’est soit quelque chose que tu concèdes toi aussi (la distinction entre Eglise et manifestants), soit quelque chose qui est contredit par les faits (la violence), soit quelque chose qu’il n’a pas dit (une contradiction avec GS76). Reste ton appréciation des mouvements cités dans le point 3. Là, j’attends que tu établissent qu’ils ne relèvent pas de ce qu’un sociologue appellerait le catholicisme intransigeant.
Bien à toi.
Hello Patrick,
SupprimerTu m'a demandé une preuve sociologique, Je l'ai trouvée ! Sur Rue 89, (plutôt classé à gauche) tu trouveras les analyses d'Hervé Lebras, démographe de l'INED, qui affirme : c'est la droite modérée qui a manifesté, celle qui a fait gagner Hollande et qu'il vient de perdre.
http://www.rue89.com/2013/04/28/mariage-tous-ps-a-fait-erreur-electorale-enorme-241844
Le printemps français, le salon beige, tout ça est assez minoritaire dans le mouvement. J'aime bien en revanche l'analyse d'Isabelle de Gaulmyn (http://religion-gaulmyn.blogs.la-croix.com/generation-catholique-spontanee/2013/04/28/).
Je répète : la violence est aux marges du mouvement, le printemps français a été exclu pour ces raisons, et les étudiants de Caen dont je suis l'aumônier qui sont très impliqués dans le mouvement, n'ont pas une once de violence dans leur discours (l'un des plus engagé est d'ailleurs homosexuel, lui a plutôt l'impression que grâce à la manif, une parole s'est libéré dans l'Eglise, et qu'il a pu enfin en parler librement grâce à elle, et refaire l'unité de sa vie... Comme quoi !)
En revanche, je sais que la couverture par libération de la première manifestation était une véritable manipulation. As-tu vu des personnes qui sont allé aux grandes manifs ?
Mais il y a un point où je te rejoins. Personnellement, je n'entre pas totalement dans les discours un peu simplistes entendus (le coup des personnes homosexuelles qui nient l'altérité je n'aime pas beaucoup non plus, l'anthropologie à la hâche du père Tony Anatrela me rend bien mal à l'aise). Mais quant à exposer mes idées, cela prendrait trop de temps. Je le ferait proprement quand j'aurai le temps !
A bientôt Patrick
Merci Pierre.
SupprimerDois-je te dire que je ne suis guère convaincu du début de ta réponse. Je ne crois pas, au risque de persévérer dans l'erreur à l'hypothèse de l'électorat modéré de Hollande. J'y crois d'autant moins que, dit-on, 40% des cathos seraient pour ce mariage. Et si ce n'est pas parmi ceux qui ont voté Hollande, ni parmi ceux, très nombreux qui ont voté contre lui, je me demande bien où sont ces 40 %. Pas chez le Pen. Chez Melanchon ? C'est une plaisanterie.
En revanche je te retrouve bien dans ton dernier paragraphe. Non parce que tu me rejoins, mais parce que tu fais fi des clivages, garde ta liberté et dis ce que tu penses. Un grand merci.
Ce texte d'évêque, pour intéressant qu'il soit, se limite à une position "d'appareil" quant aux stratégies bonnes et mauvaises pour propager ce qu'il est convenu d'appeler la "bonne parole", en fonction des circonstances. C'est sans doute dans son rôle, et force est de constater, que les divisions stratégiques sont patentes, à l'image de celles du gouvernement Hollande…
RépondreSupprimerJe n'ai rien à commenter sur ces questions intestines qui ne me concernant pas. En revanche sur un certain "fond des choses" il n'est strictement rien dit !
Rappeler que : "Ce n’est pas de calculs politiques que nous avons besoin, c’est du courage d’être nous-mêmes, des disciples et des témoins de Celui qui est venu pour « chercher et sauver ce qui était perdu » " ; m'amène cette question :
les personnes homosexuelles sont elles des brebis perdues, j'allais dire "par nature" ?
La fin du texte et ce que j'en cite le laisse entendre.
les personnes homosexuelles sont elles "un désordre" dans le plan divin ?
Dieu a-t-il crée uniquement des hétérosexuels ?
Jésus a-t-il dit quelque chose à ce sujet ?
Vous avez sans doute raison, le texte est probablement assez circonstanciel. On se demande pourquoi ce texte arrive si tard. Il y a des mois que la position de la Conférence des évêques de France est sur une ligne assez dure, malgré un texte de la commission Famille et société.
SupprimerOn peut penser que le discours de Cardinal XXIII en ouverture de l'assemblée d'avril ait fini par obliger ce type de textes. On ne peut ignorer non plus la relative marginalisation ou au moins originalité de Mgr Dagens parmi ses confrères. Le texte n'est pas forcément sans ressentiment.
Ceci dit, laissons-là ces affaires intestines, petite politique assez pitoyable. Le texte est là et soulève au moins deux questions.
1. Celle que vous posez sur le statut de l'homosexualité par rapport au discours ecclésial, et plus largement du discours social. Qu'est-elle ? Si elle n'est ni pathologie, ni délit, peut-on encore en parler comme d'un désordre ? Faute d'avoir réfléchi à ce qu'elle signifie, les discours demeurent indigents. Mais peut-on parler de signification tant que l'on pense en terme de désordre ?
2. Le statut de la vérité. J'ai écrit dernièrement ces lignes : "Il me semble que les évêques n’ont pas compris ce qu’était prendre la parole dans une société pluraliste. J’en veux pour preuve qu’ils continuent à penser que recourir à la loi naturelle permet de convaincre tout le monde sur la base d’une anthropologie rationnelle que tout homme honnête se devrait de reconnaître dès lors qu’il écoute le dictamen de sa conscience, dès lors qu’il suit les exigences de la raison.
C’est la base de la morale catholique classique. Une base qui me paraît voler en éclat dans le cadre du pluralisme, mais qui n’aurait jamais dû pouvoir valoir s’il est vrai que c’est au nom de la foi que nous devons dire quelque chose. (Je sais bien qu’ils diront que cela ne s’oppose pas, et j’en suis convaincu. Mais s’ils avaient prêché l’évangile plutôt que la morale, ils n’auraient pas pu adopter ni ce discours, ni cette attitude)." Je crois que Mgr Dagens est sans doute préparé à penser ce pluralisme.
Je viens de regarder une vidéo dans laquelle Vincent Peillon présente son livre La Révolution française n'est pas terminée. http://www.dailymotion.com/video/x704hn_la-revolution-fr-n-est-pas-terminee_creation?start=68#.UYK8crZgvVG Je crois que la clarté de ses propos devrait nous interpeller pour que nous arrêtions de nous regarder le nombril à savoir si nous sommes intransigeants ou ouverts. Je reste persuadé que derrière cette loi il y a bien plus voire tout autre chose que le désir philanthropique d'offrir des droits aux personnes homosexuelles. Si les partisans de la loi croyaient aux bienfaits du mariage pourquoi ne sont-ils pas mariés eux-mêmes? Voudraient-ils faire monter les personnes homosexuelles dans un bateau dont on ne cesse de nous dire qu'il coule?
RépondreSupprimerNous avons face à nous des néo-républicains héritiers de tout ce que le XIX° siècles a connu de courants radicaux, républicains et révolutionnaires. Ils portent le désir d'une nouvelle religion qui viendrait abolir tous les déterminismes. Ils ne veulent rien entendre de la philosophie ou de la morale naturelle car la nature leur impose le réel face à leurs idéologies. Ils discréditent les opposants à la loi à coup de diabolisation pour ne pas entendre une argumentation issue du réel. Hegel n'a pas fini de déverser son "geist". Or si le christianisme n'est pas capable de s'effrayer d'une telle prétention, je suis d'accord avec toi Patrick, les prises de paroles sonneront toujours faux. Pour que la tribune de Mgr Dagens ne soit pas creuse, il faudrait qu'elle porte une vraie dénonciation de ces idéologies et justifie ainsi que l'on puisse être intransigeants. Mais dénoncer l'intransigeance sans vouloir regarder en face contre quoi elle s'élève, c'est un coup d'épée dans l'eau. Il manque à une génération d'articuler la foi avec un engagement radical et aujourd'hui cette absence de radicalité biaise le débat.
Ceux qui avaient espéré que le monde coopère avec l’Eglise pour construire un nouveau monde font alors l’amère expérience que ça ne marche pas. Une herméneutique trop plate de Gaudium et spes en est sans doute la cause.
En fait le monde tel qu’imaginé dans cette herméneutique plate n’existe pas et il faut se rendre à l’évidence qu’il ne coopère pas avec l’Eglise pour construire un monde meilleur. La compréhension du monde glisse alors vers une acceptation de ce dernier comme lieu de la mission de l’Eglise. Il faut analyser le monde de façon presque neutre. Il faut comprendre le monde dans lequel nous vivons, le temps dans lequel nous sommes, mais aussi les besoins et les blessures de l’homme contemporain et en même temps approfondir sa foi pour envisager le meilleur témoignage, c’est-à-dire le meilleur moyen pour que notre foi vienne éclairer autrement les questions et les attentes de la société.
Dans ces analyses (presque socio-politiques) on s’interdit toute dénonciation de peur de voir resurgir des crispations dans les relations Eglise-société. La crise anti-moderniste était encore dans la mémoire de beaucoup et le Concile était alors vécu comme gage de réconciliation. Gaudium et spes était présenté comme un «contre-Syllabus», pour reprendre une expression du Cardinal Ratzinger. Mais, force est de constater que ça ne marche toujours pas.
Ce que Mgr Dagens appelle intransigeance, n’est en fait que le radicalisme évangélique né de cet approfondissement de la foi. Le monde est davantage compris dans le sens johannique du terme, i.e. porteur de traces du mal qu’il faut dénoncer et éradiquer.
Certains crieront peut-être à la parano, à ceux-là je dis: nous verrons.
Sébastien+
Je reprends votre dernier propos, et je verrai, ou ne verrai pas.
RépondreSupprimerOui, c'est du grand n'importe quoi, comme ce que j'ai pour l'heure appris du livre de Peillon (je le redis, ce que j'ai vu pour l'heure de ce livre).
M. Peillon réagit à l'arrogance des catho lesquels comme vous réagissent à son arrogance. Vous voulez quoi ? Et les cathos, qu'est-ce qu'ils font de l'évangile ? Nous savons que malins comme des renards nous devons être comme les colombes. C'est à nous de tendre l'autre joue. Vous voulez quoi, une guerre ? Si c'est pour la perdre comme la bataille du mariage pour tous, quel avantage ? Si c'est pour la gagner par la force, vous aurez abandonné l'évangile.
Il y a le chemin de la conversation, du dialogue. "L'Eglise doit se faire conversation." C'est aussi le magistère de l'Eglise, le magistère romain !
Et arrêtons de faire les anti-nombrilistes. Rhétorique. Car je ne cherche pas plus que Mgr Dagens à nous inspecter l'ombilic ! Tout cela est une astuce pour ne pas reconnaître l'intransigeance, celle qui justement interdit à l'Eglise d'être conversation.
Je ne comprends pas, vous êtes disciples de Jésus pour conquérir la société ? Changez de Seigneur, car Jésus n'a d'autre chemin que celui de la croix.
Oui, nous sommes en minorité. Votre problème est de ne pas l'accepter. Et si c'était cela l'évangile. Et si la situation avait quelque chose de providentiel, obliger l'Eglise à déserter le pouvoir.
Pourquoi serait-ci anti-évangélique que de dénoncer ce qui n'est pas évangélique? Je ne veux ni la guerre, ni la force, ni la surdité. Jésus n'a-t-il pas dit "que votre oui soit oui et que votre non soit non"? Y aurait-il une complicité avec le mal qui conduise à un fatalisme? Tendre l'autre joue: oui mais à condition de ne pas renoncer à vivre du Christ et témoigner qu'il est la Vérité... Que nous soyons une minorité ne m'effraie pas plus que ça, je ne rêve pas non plus de la fameuse Eglise pré-constantinienne où tout le monde il était beau et gentil. Si il y a bien quelque chose de providentiel c'est que des hommes et des femmes, la génération sacrifiée de la transmission de la foi, se lèvent aujourd'hui pour demander du sens, dénoncer ce qui n'en a pas.
RépondreSupprimerSébastien+
Qui décide ce qui est évangélique ou non ? Est-ce bien vrai que cette loi du mariage pour tous est anti-évangélique ? Est-ce bien vrai que s'y opposer est une signature univoque d'appartenance à l'évangile ?
SupprimerLorsque cela mène à la violence assénée, on a franchi la frontière de l'opposition à l'évangile.
La manière "premier degré" de voir dans les manifestations la levée des chrétiens de demain qui se font les évangélisateurs du monde rebelle d'aujourd'hui... comment dire ? Faut atterrir !
Témoigner de la vérité n'est possible que par et avec la charité. Est-ce cela que l'on a vu dans les manifestations ?
Je note encore que Jésus aurait sans doute apprécié que l'on dise de lui, qui se laisse conduire à la mort : "Y aurait-il une complicité avec le mal qui conduise à un fatalisme ?"
Bon courage pour vivre la prochaine semaine sainte. Cela va être difficile avec ce genre de positions. Bon, il reste juste quelques mois pour se convertir.
La réponse à la question pourrait d'ailleurs être affirmative si l'on en croit l'insensé saint Paul : "Dieu l'a fait péché pour nous".
Il ne me semble pas que Jésus, se faisant péché pour nous, se fasse complice du mal au sens où cette complicité le traine sur la Croix. C'est justement parce qu'il a été jusqu'au bout qu'il peut dénoncer le mal pour nous convertir au bien, à sa Vie. Tu ne peux tout de même pas nier qu'il y a des chemins du mal formé par le péché de l'homme et que nous devons le dénoncer. Cette dénonciation n'enlève en rien notre propre conversion, je le conçois aisément, mais de là à renoncer à nous engager résolument pour le bien en choisissant de ne pas suivre le mal...
RépondreSupprimerJésus ne s'est pas fait péché, il a été fait ; ça, c'est histoire de maquer l'agacement à l'a peu près du discours.
RépondreSupprimerEvidemment que Jésus n'est pas complice du mal. Il le dénonce en y étant livré. Il le dénonce en consentant à le côtoyer jusqu'à l'abîme de la mort.
Mais qui dit que l'on est complice du mal à dénoncer le catholicisme intransigeant ? Pas moi. En revanche on est complice du mal à jeter de l'huile sur le feu de la haine, et le discours du Cardinal Vingt-Trois en ouverture de l'Assemblée d'avril devait être suffisamment problématique pour que le ton change en clôture, pour que Dagens se permette ce texte.
C'est quoi ne pas choisir le mal ? s'opposer à ce mariage ? Vous rigolez. Qui est dans la rue pour défendre la Syrie ? Qui est dans la rue pour les enfants qui meurent de faim ? Qui est dans la rue contre les politiques pourris comme Cahuzac, sans doute Guéant, et je ne dis rien des Tibéri, Balkany, et j'en passe, que les Français réélisent ? Qui était dans la rue quand la loi autorisant la PMA avec tiers a été adoptée ? Qui est dans la rue pour dénoncer la finance sauvage ?
J'imagine qu'il n'est pas besoin d'autres exemples pour montrer que dans cette affaire ce n'est pas le rejet du mal qui nous meut, sans quoi nous serions aussi sur d'autres fronts.
On est prêt à lapider la femme adultère, c'est tellement évident que c'est une salope. Mais pour le reste, il n'y a pas urgence. Heureusement que Jésus a choisi de faire des prostituées celles qui nous précèdent. Non qu'il était pour la prostitution, Non que les homos qui veulent se marier soient des prostituées, encore que nombre de ceux qui sont contre ce mariage, et qui statistiquement, pour une part, recourent aux prostituées, ne seraient pas loin de le penser, Abomination !. Mais que c'est la seule manière, la dernière cartouche, pour essayer de faire entendre aux hypocrites, que l'évangile se joue ailleurs.
Le ton est agacé à la mesure de l'hypocrisie. Qu'en avez-vous à faire de ce mariage ? Qu'est-ce qu'il vous change ? Vous êtes célibataires, et bien que Dieu vous garde en la continence à laquelle votre baptême vous engage et laissez les autres célébrer un amour qui aussi pourrait parler de celui de Dieu pour l'humanité, du moins pas moins que celui d'Osée avec sa prostituée de femme. Vous êtes mariés, persévérez dans le respect chaste de votre conjoint. Que d'autres souhaitent vivre pareille chasteté dans l'engagement fidèle à respecter le corps de l'autre tout en s'offrant à lui, n'ôte rien à la vôtre.