Pourquoi sommes-nous disciples de Jésus ? Pourquoi sommes-nous chrétiens ?
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On voit bien que la tradition ne suffit pas
quand, avec elle, on en prend et on en laisse, quand nos pays de tradition
catholique ne sont plus guère catholiques.
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On voit bien que ce n’est pas pour aller
chercher la bénédiction de Dieu, comme si Dieu attendait qu’on le lui demande
pour nous bénir ou nous protéger, comme si les non-croyants n’étaient pas aussi
aimés de Dieu.
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On voit
bien que ce n’est pas pour les valeurs, le pardon, le respect, l’écoute,
l’amour : Pas besoin d’être chrétiens pour les pratiquer, sans parler de
ce que nous chrétiens ne les vivons pas forcément mieux que d’autres !
Alors, pourquoi sommes-nous disciples de Jésus ?
Certains avancent des explications de type identitaire ;
le sociogramme de nos paroisses pourrait les confirmer. L’Eglise serait
gardienne et défenseur de l’ordre moral et social et de l’être humain de la
conception à la mort. Là encore, cela ne suffit pas ! Nous sommes des gens de passage (1 P 2,11),
étymologiquement des paroissiens, citoyens du Royaume. Nous ne sommes pas là
pour installer une société chrétienne. Ou alors, nous instrumentalisons
l’évangile au profit d’un système social et politique.
A court d’arguments, il faut en convenir, nous ne savons pas
pourquoi nous sommes disciples. Nous constatons que nous le sommes, comme à
notre insu. Nous sommes tenaillés par le Christ. Nous sommes incapables de nous
comprendre sans lui. Parce que c’était
lui, parce que c’était nous. Ce que nous vivons avec les frères nous parle
du Royaume.
L’allusion à Montaigne indique une affaire d’amour,
d’amitié. Nous avons connu l’amour et
nous y avons cru (1 Jn 4,16). Et la foi n’est pas une exception. Allez
savoir pourquoi vous aimez le rugby plutôt que le foot ! Prenons un
exemple moins trivial : pourquoi cette personne est celle que vous
aimez ? Parce que c’est lui, parce
que c’est vous. Sans pourquoi de la rose qui s’épanouit, gratuité,
gracieuse, grâce. Bien sûr, nous savons aussi ce que nous aimons ou non, en
l’autre, mais ce n’est pas cela qui fait qu’on l’aime.
Il ne sert à rien de croire, ai-je plusieurs fois prêché,
suscitant l’étonnement voire la réprobation. L’évangile conteste le diktat
d’une société du profit, accro à la réussite, à l’utilité. Ce qui ne sert à
rien ne vaudrait rien. Demandez à vos ados ce qu’ils pensent du latin ! Et
nous, disciples, penserions ainsi, de façon mondaine ?
Tertullien, vers 200, disait qu’il croyait parce que c’est
absurde. Evidemment que la foi n’est en rien contraire à la raison ! Mais
on ne peut la justifier, car c’est elle qui justifie, qui rend juste. Si nous
croyons « parce que », nous nous servons de la foi comme d’une
explication, nous l’instrumentalisons. Plutôt que de ridiculiser la foi en la
défendant par des raisons qui n’en sont pas, mieux vaut en parler comme ce
qu’elle est, un amour. « La raison d’aimer Dieu, c’est Dieu même. »
(st Bernard s’inspirant de st Augustin). Il n’y a pas de raison, de « pourquoi »
ni « parce que ». La foi c’est comme l’amour.
Alors, pourquoi sommes-nous disciples ? Nous confessons que nous avons été saisis
(Ph 3,12). Nous n’y sommes pour rien ou si peu. Il vaut mieux ne pas croire, si
l’on ne croit pas, ou plus, que Dieu est amour ; ce serait croire en une
caricature monstrueuse de Dieu. Les chrétiens sont plus que tous athées du dieu
qui serait justifiable ou utile, protection ou explication du monde. Touché par
l’amour, qui pourrait ne pas répondre ? Qui enverrait balader
l’amour ?
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