10/11/2014

Après le dernier synode... "C'est la miséricorde que je veux" (Mt 9,13)



Le synode des évêques (Rome, 5-19 octobre) a été assez bien couvert par la presse, au point que certains ont parlé d’un « synode des média », contestant les analyses, les jugeant formatées par les débats politiciens, inadaptées à la vérité de la doctrine catholique. Déjà il y a cinquante ans, on avait parlé d’un « concile des média » et Benoît XVI avait rendu ce dernier responsable d’une interprétation erronée de Vatican II. Les media évidemment ne sont pas toujours bienveillants, mais lorsque l’Eglise pose les questions sans tabous, on constate qu’elle intéresse encore notre monde.
Le Pape n’a manifestement pas peur de l’opinion publique, de montrer que la discussion a été tendue, qu’il y a des désaccords, bien loin de l’unité de façade à laquelle on voulait faire croire jusqu’alors. Jouant la transparence, il joue une carte tactique. Il sait qu’il peut compter sur l’opinion catholique et l’opinion publique en général. « Je préfère une Eglise accidentée, blessée et sale pour être sortie par les chemins, plutôt qu’une Eglise malade de la fermeture et du confort. » (Evangelii Gaudium, § 49)
La discipline de l’Eglise envers les divorcés remariés et les personnes homosexuelles doit-elle changer ? Ne court-on pas au laxisme sous prétexte de miséricorde ? Il va de soi qu’aucun évêque n’a l’intention de brader la foi. Aucun ne veut banaliser la séparation des époux ni donner à penser que l’on pourrait se séparer de l’autre de façon inconséquente. Comme Jésus (cf. Mt 19,1-12), nous ne saurions valider la répudiation.
Jésus a pardonné toutes sortes de péchés que la morale catholique réprouve. Certes, il peut assortir son pardon d’une formule fort exigeante : « Va et désormais ne pèche plus ». Mais le pardon de Jésus reste inconditionnel, acte de son amour. Ceux d’entre nous qui font régulièrement leur examen de conscience, qui célèbrent le sacrement du pardon, savent que la miséricorde du Seigneur, heureusement, n’est pas conditionnée par leur conversion et leur changement de vie. Au contraire, notre vie est changée par la miséricorde.
Parler d’attitude miséricordieuse envers les divorcés remariés signifie que l’Eglise ne peut imposer la même sanction à tous (l’interdit des sacrements) sans tenir compte des circonstances. Non seulement, tous les remariés ne sont pas des pratiquants de l’eucharistie ! Du coup, l’ouverture des sacrements ne concerne pas tout le monde. Mais encore, tous ceux qui ont divorcé n’ont pas la même responsabilité dans l’échec des couples. Une gradualité de la sanction ne serait que justice. La femme battue qui demande le divorce n’a pas la même responsabilité dans l’échec de son couple que son conjoint violent.
Le dernier concile a modifié nos regards sans que le droit ecclésial n’ait entériné ce changement. D’une part, nous considérons la sexualité comme un don de Dieu, qui certes peut être mal utilisé, mais demeure fondamentalement une grâce. D’autre part, nous sommes éminemment sensibles aux propos évangéliques tels que : « c’est la miséricorde que je veux ». La justification de la discipline actuelle (qui dénonce la non-compréhension de l’enseignement de l’Eglise sur la famille même par des catholiques) donne l’impression d’arguties canonico-dogmatiques qui ne font plus sens et paraissent relever de l’hypocrisie.
Commentant l’évangile de Lc 14,1-6 le 31 octobre, François disait : « Le choix de vivre attachés à la loi éloignait les pharisiens de l’amour et de la justice. Ils prenaient soin de la loi, mais ils négligeaient la justice. Ils respectaient la loi, mais négligeaient l’amour. Ils se considéraient des modèles. Et c’est pour cela que Jésus pour ces gens n’avaient qu’un seul mot : des hypocrites. Ils cherchaient partout des prosélytes et puis ? Ils fermaient la porte. Des hommes de fermeture, des hommes tellement attachés à la loi, à la lettre de la loi, non pas à la loi qui est celle de l’amour, mais à la lettre de la loi qui ferme les portes de l’espérance, de l’amour, du salut… Des hommes qui ne savaient que fermer. […] La chair de Jésus, voilà le pont qui nous rapproche de Dieu… et non pas la lettre de la loi : non ! Dans la chair du Christ, la loi se réalise pleinement. […] Que cet exemple de proximité de Jésus, de l’amour à la plénitude de la loi, nous aide à ne jamais glisser dans l’hypocrisie : jamais. C’est tellement laid un chrétien hypocrite. Tellement laid. Que le Seigneur nous sauve de cet écueil ! »


Une analyse d'I. de Gaulmyn qui décrypte un non des évêques au rapport intermédiaire. Le titre de la conclusion 'retour en arrière ?" l'indique clairement ; le point d'interrogation semble bien rhétorique !
Les points soulevés par l'article font tous débats et pour l'heure ont tous été retoqués. Ce ne sont pas seulement trois paragraphes, mais une logique de fond qui n'a pas réussi a rassembler les 2/3 des voix.
Avec un épiscopat formaté par les deux précédents pontifes, ce n'est guère étonnant.
L'article ne dit rien, et je n'ai pas encore pris le temps d'aller voir le rapport final, de la famille comme lieu de souffrance. Or, il me semble que le discours de l'Eglise sera crédible lorsque l'on sera plus réaliste et cessera d'idéaliser la famille. Il s'agit seulement d'aimer les familles comme n'importe quel membre souffrant et pécheur du corps du Seigneur.

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