L’Eglise de France va vivre mardi prochain 5 octobre un nouvel épisode, dramatique, de la crise de la pédocriinalité. La Ciase, Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Eglise [catholique] va remettre le rapport que la Conférence des évêques de France et la Conférence des religieux et religieuses de France lui ont commandé.
La pédocriminalité doit être comprise pour ce qu’elle est, une destruction, un handicap irréversible, et rejetée, dénoncée, sans aucune autre limite que celle de la recherche de la vérité, dans les familles où l’inceste est encore trop systématiquement tu et occulté, dans toutes les autres situations, notamment les clubs sportifs, et bien sûr dans l’Eglise.
Lorsque des prêtres se rendent coupables de pareils crimes, lorsque les communautés et les supérieurs ou les confrères dissimulent ces crimes, les victimes sont non seulement violées ou abusées sexuellement ; l’ordre de l’amour, la pratique de l’amour est rendu grandement impossible ; mais encore, tout ce qui touche aux relations humaines et ce qui les fonde, et tout ce qui touche à l’évangile est réduit à un mensonge. Si certaines victimes peuvent encore croire en Dieu, c’est qu’elles ont trouvé en lui vers qui crier l’indicible.
Il n’y a pas de solution magique, efficace à cent pour cent, pour que ces crimes, comme toutes les autres violences, soient définitivement éradiqués. Tout ce qui pourra être fait ne sera jamais superflu, dans l’éducation des enfants, dans la prise de conscience de l’ampleur du crime, dans la réforme de l’Eglise, dans le choix des candidats au presbytérat et à l’épiscopat, etc. Les narcissiques plus ou moins pervers n’ont de place dans l’Eglise que comme des malades qu’il faut si possible soigner et dont il faut se protéger. Ils organisent l’Eglise en vue de leurs desseins arrivistes ou comme une cour avec des favoris, des personnes en disgrâce, l’impossibilité de contester ou simplement d’interroger, etc. Trop nombreux sont parmi les prêtres et les évêques, ceux prennent leur ordination pour un changement d’état, comme s’ils ne partageaient dès lors plus la commune condition.
L’Eglise, notamment catholique, n’a pas de théologie des ministères solide. Elle refuse, y compris à Vatican II de renoncer à la sacralité du sacerdoce alors que l’évangile est une désacralisation. Jésus récuse les catégories de pur et d’impur, de sacré et de profane. Il est préoccupé par la bonté, la miséricorde, la justice et l’amour des frères à commencer par les plus petits. L’évangile du jour nous le rappelle si besoin était (Mc 10, 2-16). Il n’y a pas de domaine réservé qui échapperait à l’Esprit. Rien ne peut échapper à l’Esprit.
La messe tridentine ce n’est pas la tradition ou le latin. La messe de Paul VI a bien plus de quartiers de tradition et peut être célébrée en latin et ad orientem. Ce n’est donc pas le latin ou l’orientation qui spécifie l’ancien ordo, mais son rapport au sacré qui, dans la société contemporaine, prend un sens décidément contraire à l’évangile quoi qu’il en ait été au XVIe siècle. On comprend que François en encadre très strictement l’usage !
Les catholiques doivent interroger leur rapport au sacré. Dieu n’est pas le sacré, mais celui qui rend saint. L’eucharistie n’est pas sacrée, elle est la nourriture pour l’ordinaire des jours, afin qu’ils puissent être habités par l’Esprit qui sanctifie, l’Esprit de sainteté.
Les catholiques doivent cesser de prendre en fondamentalistes notre évangile à la lettre comme s’il était une loi divine sur le mariage, alors que le texte précise qu’il s’agit d’un piège. Comment la réponse de Jésus pour se sortir de l’épreuve pourrait-elle être une norme intemporelle, indiscutable, définitive ?
Dans la résistance à la désacralisation, les quasi dogmes du célibat des prêtres et de la non-ordination des femmes jouent un rôle-clef. On ne supprimera ni le cléricalisme, ni la pédocriminalité en ordonnant des femmes ou des hommes mariés, mais tant que l’Eglise catholique ne s’y rendra pas, elle sera incapable de renverser la sacralité des prêtres et, partant les crimes qui en découlent.
Le rapport de la Ciase ne peut être accueilli le dos rond, en attendant que ça passe. Nous devons le prendre au sérieux. Et comment faire autrement puisqu’il s’agit de crimes contre des enfants ? L’Eglise catholique doit revoir son dispositif dogmatique notamment sur les questions de sexualité, de ministères, de sainteté et d’eucharistie. Ne pas le faire, c’est n’avoir rien à faire du rapport de la Ciase, mépriser une nouvelle fois les victimes des clercs pédocriminels, maintenir en l’état un système pervers.
Dans le journal " Le Monde " reçu ce matin, daté du dimanche 3 et lundi 4 octobre 2021, les pages 10 et 11 signées Cécile Chambraud sont tout à fait intéressantes qui présentent la méthodologie de la Ciase, l'historique de son travail, les surprises des membres ... Bientôt le rapport et sa présentation : ça va être quelque chose ! Félicitations à toutes les personnes qui ont travaillé et parlé. Honte au seul évêque qui n'a pas voulu donner accès aux archives de son diocèse. Et surtout bravo et merci à MONSIEUR JEAN-MARC SAUVÉ. On ne pouvait espérer choix plus pertinent.
RépondreSupprimerhttps://www.lemonde.fr/societe/article/2021/10/03/violences-sexuelles-dans-l-eglise-les-coulisses-de-la-commission-sauve_6096906_3224.html
RépondreSupprimerMalgré ma réticence à user de Facebook, je recommande d'y aller lire quelques Sauvé, Cassingena-Trévedy, Devaux, Royannais, etc.
RépondreSupprimerCe rapport est accablant et sérieux. Allons plus loin encore! Qui pourrait faire un rapport de même type pour tous les crimes de la sorte au même des familles, à l’école et dans le monde médical ???? C’est un fléau que nous devons dénoncer sans regret comme le fait l’église et c’est bien regrettable, Mais surtout être suivi par les tribunaux trop souvent laxiste. Sanctions exemplaires démissions, retrait des titres soins obligatoires, parution dans les journaux etc r etc.
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