17/05/2013

Nul ne peut dire "Jésus est Seigneur" sans l'Esprit (1 Co 12,3). Pentecôte


Faut-il prêcher sur la Pentecôte ou sur la profession de foi, sur l’Esprit saint ou sur ce que signifie affirmer : « Je crois ? » Faut-il privilégier la fête liturgique qui clôt le temps pascal ou accompagner les jeunes qui font aujourd’hui profession de foi. ?
Peut-être y a-t-il une voie qui permette de ne pas avoir à choisir ou plutôt qui permette de choisir les deux. Essayons. Lorsque Jésus se retire de ce monde et disparaît à tout jamais à nos regards, lorsqu’il laisse ses disciples, nous, comme orphelins, il envoie son Esprit. Lorsqu’il meurt, il remet l’Esprit dit saint Jean.
Aujourd’hui, si nous sommes rassemblés, deux millénaires après la mort de Jésus, c’est que l’Esprit habite en nous. Qu’est-ce que cela veut dire ? Je ne vois pas comment avec toute l’hommerie qui habite l’Eglise, comme le monde, il pourrait y avoir encore des disciples du Seigneur, car les premiers destructeurs de l’Eglise ne sont pas ses adversaires, de façon générale, mais bien ses membres et leur péché.
Indépendamment même de ce péché, comment l’Eglise pourrait-elle encore conserver vive la mémoire de Jésus par ses propres forces ? Si l’Eglise était une institution dont le but consisterait à éduquer le genre humain ou à défendre une conception de la civilisation, ce que l’on appelle une idéologie, aurait-elle pu tenir si longtemps ? L’Eglise est autre chose, et nous le savons bien, ce matin. Nous ne sommes pas venus ce matin pour nous serrer les coudes, mais pour ouvrir les bras, ainsi que le disait le responsable de la nouvelle Eglise Protestante Unie. Nous ne sommes pas venus à un meeting, au rendez-vous d’un parti ou d’un club de pensée. Nous ne sommes pas venus ce matin pour une leçon de morale, encore que notre quête du Christ nous engage à une conversion de vie. Aussi indispensables et bonnes que soient les ONG, l’Eglise n’en est pas une ou elle se perd, comme dirait François.
Si nous sommes là, ce matin, si, deux millénaires après Jésus, l’Eglise est là, c’est parce que l’Esprit de Dieu habite nos cœurs. Nous ne sommes pas capables de nous tourner vers Dieu pour accueillir son offre d’amour, pour l’accueillir. Lui seul peut nous donner la force de l’accueillir. Et l’Esprit saint, c’est la force de Dieu qui habite en l’homme pour que l’homme accueille son Dieu. L’Esprit saint, c’est Dieu qui déjà nous divinise de sorte que nous vivions de Dieu, dès ici, dès maintenant.
La proximité de Dieu annoncée par Jésus nous est devenue tellement évidente, au moins en théorie, car dans la pratique nous devons bien reconnaître que la prière n’est pas forcément ce qui nous occupe le plus, ou le service du frère, ou que, dans la prière, nous éprouvons la nuit de la foi dont parlent les grands saints du Carmel, la proximité de Dieu nous fait oublier que rien n’est naturel dans cette affaire, que l’homme est bien incapable de s’adresser à Dieu si Dieu ne vient pas à sa rencontre.
Dieu qui vient à notre rencontre aujourd’hui, Dieu qui maintient vive la mémoire de son Christ en ce monde, c’est cela l’Esprit qui s’empare de nous comme un grand vent qui nous porte jusque dans la vie de Dieu. Dieu vient à notre rencontre aujourd’hui, et c’est pourquoi nous pouvons professer la foi. De nous-mêmes, ce serait impossible.
Plusieurs des jeunes diront dans un instant que leurs parents ont choisi la foi pour eux au jour de leur baptême et qu’aujourd’hui, ils font eux, la démarche de dire leur foi. Puis-je dire que je ne suis pas totalement convaincu par ces propos, par ailleurs fort compréhensibles. Ce ne sont pas les jeunes qui vont professer la foi dans un instant, pas plus que ce n’est pas nous, dimanche après dimanche, qui professons notre foi. C’est l’Esprit saint qui s’empare de nos gorges pour que résonne dans l’Eglise le « Je crois » qui fait vivre, le « Je crois » qui est la respiration, ou plutôt son aspiration si l’inspiration est le service du frère, ou inversement.
Oui, vous allez dire votre « Je crois », mais ce n’est pas le vôtre, c’est le nôtre, le nôtre et le vôtre puisque vous êtes des nôtres, celui de l’Eglise, c’est celui de l’Esprit saint en vous qui vous rend capables de Dieu. Ainsi, il nous a créés capables de lui. Ainsi, nous avons été baptisés, recevant l’Esprit de vie. Au début de cette célébration, c’est l’eau du baptême qui nous a purifiés de notre péché. Dans un instant, allumé à la lumière pascale, vous tiendrez le cierge de votre baptême.

En disant « Je crois », vous ne faites rien de neuf par rapport à votre baptême. Vous continuez seulement, si je puis dire, mais c’est énorme, la construction de cette Eglise qui depuis deux millénaires par l’Esprit est chargée de maintenir vivante dans notre monde la mémoire du Seigneur Jésus.

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