Qu’est-ce qu’un prêtre ? La réponse s’avère compliquée
parce qu’elle engage des théologies différentes voire opposées. Nos langues
modernes ne font plus guère la distinction entre deux mots grecs ou latins et
entretiennent ainsi la confusion. Il y a la famille des mots presbytère,
presbytéral et prêtre, qui veut dire ancien et que l’on retrouve dans
presbytie. Il y a la famille des mots sacerdoce, sacerdotal, formés sur l’idée
de sacré, de sacrifice ; le sacerdos
est celui qui fait le sacré par le sacrifice, qui a rapport au sacré.
Dans le nouveau testament, le terme commun est naturellement
utilisé pour désigner les prêtres Juifs ou païens, mais jamais les ministres
chrétiens. En ce sens, il n’y a pas de prêtres (sacerdos) chez les chrétiens des premiers siècles, mais seulement
des anciens (presbyter), terme non
religieux. Les premiers chrétiens ne pensent pas appartenir à une nouvelle religion
avec ses prêtres, soit qu’ils soient déjà Juifs, soit qu’ils fassent rupture
avec la religion, sa mythologie, ses sacrifices, ses prêtres, et aussi les
règles de la cité.
Il faut noter que Jésus est appelé grand prêtre (sacerdos) dans l’épître aux Hébreux et
en conséquence, le peuple qui est son corps est appelé, chez Pierre et dans
l’Apocalypse, peuple sacerdotal. Dans ce peuple, certains assurent le ministère
d’anciens ou presbytéral.
A la toute fin du premier siècle, une comparaison
sacerdotale est utilisée pour parler des anciens ou des épiscopes (ceux qui
veillent sur et que l’on appelle aujourd’hui évêques). On lit allégoriquement les
Ecritures juives pour prêcher l’évangile ; le premier testament est lu
comme une prophétie de l’évangile. Ainsi parle-t-on des anciens comme des
lévites ou des prêtres. Mais cela ne veut pas dire que les anciens soit prêtres
puisque c’est le peuple qui est sacerdotal, chargé de l’intercession et de la
louange pour toute l’humanité (Cf Rm 12).
Au début du XVIe siècle, Luther dénonce les mœurs du clergé
et conteste le fait que le vocabulaire sacerdotal soit réservé aux clercs. En
réaction, le Concile de Trente (1545-1563) affirme plus fort que jamais le sens
sacerdotal du presbytérat et l’aspect sacrificiel de la messe. D’ailleurs,
depuis le début du deuxième millénaire, le sacerdoce était défini comme « pouvoir
de consacrer » le pain et le vin.
Derrière ces questions de vocabulaire se cachent des enjeux
polémiques ou œcuméniques. Le Concile Vatican II (1962-1965) respecte presque
toujours la distinction entre sacerdos
et presbyter. En outre, il utilise quasi toujours le pluriel, parce qu’être
prêtre, c’est entrer dans un corps, l’ordre des prêtres. Ainsi, ce n’est pas
leur rapport au sacré ni à l’eucharistie qui définit les prêtres dans l’Eglise
ancienne comme à Vatican II, mais la mission, le ministère. Ministère signifie service,
ce qui concerne ce qui est petit, mini.
Les prêtres appartiennent à l’ordre, la classe, des serviteurs.
Pas sûr que les prêtres apparaissent comme des serviteurs,
même si plusieurs s’emploient par exemple à ce que les locaux soient propres et
accueillants, que tous aient une feuille de chants, etc. Il est vrai qu’on les
voit plus décideurs et chefs de la communauté. Comment n’être ni puissant ou
patron, ni larbin, personnel de service ou employé d’un petit commerce qui doit
fournir ce que le client roi exige de lui ? Comment être au service de
tous sans l’autorité d’une interprétation des Ecritures ? En outre, dans
un monde démocratique, comment exister avec autorité alors que tous sont fondamentalement
égaux ?
Le service des prêtres est celui de la communauté et c’est
la mission de cette communauté qui lui donne sens. Elle est elle-même au
service de l’humanité, de la fraternité dans l’humanité. Les prêtres sont les
serviteurs qui permettent à la communauté de répondre à sa vocation :
servir et avoir soin de la fraternité humaine et ainsi rendre témoignage au
seul Dieu et Père.
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