21/06/2024

« Seigneur, nous sommes perdus. Cela ne te fait rien ? » (12ème dimanche du temps)


 

A une semaine des élections législatives, nous crions : « Seigneur, nous sommes perdus. Cela ne te fait rien ? »

Espérons-nous qu’il se réveille comme le raconte l’évangile (Mc 4, 35-41) et ordonne aux vents contraires et à la mer démontée : « Silence, tais-toi ! ». N’est-ce pas plutôt à nous qu’il devrait ordonner de garder notre calme. Nous passons avec lui d’une rive à l’autre, nous changeons avec lui d’horizon, cela ne peut que remuer, mortellement. Il s’agit rien moins que de faire mourir l’homme ancien pour que naisse un homme nouveau, une humanité nouvelle, des cieux nouveaux, une terre nouvelle ou germera la justice.

« Nous le savons : l’homme ancien qui est en nous a été fixé à la croix avec lui pour que le corps du péché soit réduit à rien, et qu’ainsi nous ne soyons plus esclaves du péché. Car celui qui est mort est affranchi du péché. Et si nous sommes passés par la mort avec le Christ, nous croyons que nous vivrons aussi avec lui. Nous le savons en effet : ressuscité d’entre les morts, le Christ ne meurt plus ; la mort n’a plus de pouvoir sur lui. Car lui qui est mort, c'est au péché qu'il est mort une fois pour toutes ; lui qui est vivant, c'est pour Dieu qu'il est vivant. De même, vous aussi, pensez que vous êtes morts au péché, mais vivants pour Dieu en Jésus Christ. » (Rm 6)

Evidemment, notre mort fait quelque chose au Seigneur, elle le meurtrit et le tue. Il sait que nous sommes perdus, voire que nous nous employons à nous perdre. « Pourquoi êtes-vous si craintifs ? N’avez-vous pas encore foi ? »

Hier comme aujourd’hui, le mensonge est partout ; le mal, une bête tapie à notre porte. J’entendais des chrétiens décidés dans leur foi s’interroger : Que se passe-t-il s’il y a à choisir entre RN et LFI ? Mensonge. Il n’y aura pas LFI. Il y aura un front qui se dit populaire et ne se réduit pas à LFI. Nous ne serons pas face à deux extrême à renvoyer dos-à-dos.

Le diable se cache dans les détails. Ainsi le serpent reprenant sournoisement les propos du Seigneur : « Alors Dieu a dit vous ne mangerez pas de tous les arbres du jardin », sous-entendu d’aucun arbre. Eve corrige, si « on peut manger de tous sauf un ». Pourtant, le mal est fait : l’humanité met la main sur tout y compris la Part-Dieu, la part du pauvre, la part de qui n’est pas du coin, exclu.

Il est fort probable que la barque de la République, et avec elle de l’Etat de droit, sombre encore un peu plus dans trois semaines. C’est là que je me mets à espérer un enfer, que payent ceux qui ont conduit à cette situation, à commencer par le Président de la République, non par sa décision de dissoudre l’Assemblée, mais par son humiliation des sans-dents. Dès les gilets jaunes, sa superbe était une insulte, le mépris de qui ne trouvait pas un job à traverser la rue. Chasse aux pauvres qui sont stigmatisés comme profiteurs pendant que les plus riches échappent à l’impôt légalement (il suffit de faire les lois pour eux) ou non.

Depuis des décennies, nous savons que la représentation nationale ne représente pas tout le monde. Qui s’occupe de ceux que personne ne représente ? Ils ont le droit de vote, ils ne se plient plus à l’argument des Messieurs qui parlent bien et savent. Depuis des décennies, pour payer moins, on réduit les services publics et l’on creuse le fossé social. Depuis des décennies, on parque en banlieue ceux dont on ne veut pas, on achète un minimum de paix avec des millions, mais l’on refuse toute mixité sociale. Depuis des décennies, les prisons rassemblent non pas les coupables mais, parmi les coupables, ceux seulement dont ceux qui comptent ne veulent pas. Les autres, on leur trouve toujours une alternative.

Bien sûr que la situation meurtrit le Seigneur, et nos cris, s’il avait besoin d’être réveillé, ne provoqueront pas de miracle, car on n’échappe pas à la mort. Dans le plus noir, une ouverture sur la résurrection sera aperçue par qui pratique la fraternité, une traversée de la mort comme de la mer, pour accéder à l’autre rive. Il n’y aura jamais de politique juste en tout, parce que l’évangile n’est pas sérieux pour qui gouverne, possède, de droite comme de gauche, du centre, d’un extrême ou d’un autre.

Les disciples ne peuvent entrer dans la logique partisane parce qu’aucun parti, même ceux qui ne jouent pas avec le feu, qui ne mettent pas le feu aux poudres de la haine, n’est pratique de l’évangile : la folie de la croix, un monde où tous sont frères, y compris les ennemis ; la miséricorde renverse les puissants de leur trône et renvoie les riches les mains vides. Nous ne le comprenons que trop, nous qui ne sommes que si peu disposés à aimer les ennemis. Nous préférons croire que nous n’en avons pas.

Précisément, l’évangile est affaire de pratique. Là où je vis, avec et auprès de ceux avec qui je vis, trancher : le toujours plus est homicide, en matière de pouvoir et d’argent. Qu’as-tu besoin de tout cela ? Ta vie est-elle dans ce que tu possèdes ? Qu’as-tu à chercher le pouvoir ? Le service est le chemin de la libération, parce qu’en nous faisant frères et sœurs les uns des autres, nous recevons une fraternité où la peur n’a pas de place.

1 commentaire:

  1. La réflexion faite est à couper le souffle. Oui, le manque de fois des disciples est dans leur reproche à Jésus de ne pas agir, de ne pas être éveillé. Ce faisant ils le méconnaissent, en somme, ils le crucifient par leur dureté et leur exigence. La première tempête à apaiser est celle de leurs cœurs.

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