Comment savoir aujourd’hui que Jésus est ressuscité ?
Si nous devions faire un discours comme ceux que l’on trouve dans les Actes des
apôtres, si nous devions comme Pierre, nous adresser à la foule, que
dirions-nous ? Si nous devions… mais nous devons. Que disons-nous de la
résurrection aujourd’hui ?
Nous croyons par ce que c’est écrit. Mektoub, comme disent
les musulmans. De fait, les Ecritures racontent la résurrection de Jésus. Le
Premier Testament peut être lu comme une prophétie de Jésus. Le Psaume 4 dit Tu
ne peux laisser ton ami voir la corruption. Le livre d’Isaïe dit que le juste
persécuté et maltraité, tué, sera celui qui justifie les multitudes. Le psaume
2 ajoute : tu es mon Fils, moi, aujourd’hui je t’ai engendré, comme s’il
annonçait le premier-né d’entre les morts.
Mais on le voit, lire ainsi les Ecritures suppose qu’on les
interprète. Il ne suffit pas que cela soit écrit, mektoub. Sans compter que ces
Ecritures ne sont peut-être à considérer que comme une mythologie, des écrits vieux
de quasi deux milles ans, et plus encore, témoins de ce que pensaient des
personnes à la mentalité religieuse, bien différente de la nôtre. Qu’est-ce qui
dit la vérité des Ecritures ?
En avançant les Ecritures comme vérités de la résurrection,
nous sommes renvoyés à leur vérité à elles, et nous n’avançons guère. Certes,
on ne voit pas bien pourquoi on aurait inventé tout cela, si ce n’est que la
littérature est depuis toujours une expression du sens, de la compréhension de
la vie de l’homme. Et la fiction n’est pas la dernière pour dire le sens. Quant
à elle, elle reste fiction, invention.
On dira que nous croyons la résurrection sur le témoignage
des disciples, transmis de génération en génération, depuis quasi deux mille
ans. Et quoi qu’il en soit dans nos pays, jamais, il n’y eut autant de
disciples de Jésus qu’aujourd’hui. Des gens simples et des chercheurs, des
savants et des hommes et des femmes de toute culture.
Oui, nous ne croyons pas seuls. Il y a depuis les origines
une communauté. Oui, nous le savons, croire à plusieurs est une aide pour la
foi. Reste que sur tous ceux qui se disent chrétiens, combien croient vraiment
à la résurrection ? Qu’est-ce qui relève encore d’un animisme peu
converti, peu évangélisé, y compris ici en Occident ?
Les raisons de croire du passé ne semblent pas suffire. Ce n’est
sans doute pas une raison pour les rejeter. Mais il faut encore autre chose.
Quoi donc ? Si nous cherchons une preuve, nous nous trompons. Car nous ne
cherchons pas à savoir la résurrection de Jésus, mais à la croire. Si la
résurrection de Jésus était un fait de l’Antiquité établi comme sa vie et sa
mort sous Ponce Pilate, ou la condamnation et la mort de Socrate, cela ne
ferait pas de nous des disciples. Il n’y a pas de disciple de Socrate, de vie
philosophique, qui célèbre chaque semaine son héros.
Nous ne cherchons pas une preuve de la résurrection du
Seigneur qui serait de l’ordre d’un savoir. Nous cherchons à comprendre comment
il est possible d’être aujourd’hui disciples d’un homme mort il y a presque
deux mille ans.
L’indice le plus encourageant pour parler de la résurrection
de Jésus c’est la communauté de ses disciples. Depuis deux mille ans, et encore
aujourd’hui, des hommes et des femmes préfèrent mourir plutôt que d’abandonner
Jésus. Depuis deux mille ans, et encore aujourd’hui, des hommes et des femmes
se réunissent chaque dimanche. Depuis deux mille ans et encore aujourd’hui, au
nom de Jésus, des hommes et des femmes, se font samaritains de leurs frères. La
résurrection de Jésus ne se révèle pas ailleurs que dans la fraternité qu’il
institue à donner Dieu à l’humanité comme Père.
Ce que nous vivons dans l’étude du mystère de Dieu et la
lecture des Ecritures, dans la charité, dans la prière, ce que nous désirons au
plus profond de notre personne et que nous laissons parfois venir à la parole,
ce que nous comprenons de la vie humaine en ce monde comme fraternité destinée
à vivre en paix et à bénéficier de la création, malgré tous nos rêves que nous
risquons toujours de prendre pour la réalité, et malgré l’horreur du mal qui
nous fait chanceler, voilà qu’en Jésus le Vivant, ce pourrait être mené à un accomplissement
dont nous ne soupçonnons qu’une infime dimension.
C’est évidemment dans la foi que Jésus peut-être reconnu
vivant. Les disciples le savent mort mais le croient vivant ; il n’y a
plus personne pour condamner semblable affirmation, contrairement au très obtus
Pie X. Ce qui fait que nous croyons en Jésus, c’est qu’il est justement pour
nous, ici, le vivant.
Le pourcentage de disciples de Jésus a diminué considérablement
dans nos pays depuis quelques décennies. La société n’est plus chrétienne, non
pas d’abord numériquement, mais structurellement. Elle n’encadre plus les
individus dans leur foi. On est disciple de Jésus, en grande partie sans la
société, parfois contre elle. Si Jésus n’est pas le Vivant aujourd’hui, si pour
nous, être chrétien c’est une affaire de tradition, cela n’ira pas loin. Nous
ne nous levons plus le dimanche, à moins de faire partie du petit pourcentage
des nostalgiques pour qui la religion est affaire politique et identitaire,
pour qui la foi de nos pères est un attachement à l’institution ecclésiale plus
qu’à Jésus. L’Eglise, oui, Jésus non !
Mais si Jésus vient à notre rencontre, croiser nos espoirs
et nos peines, nos joies et meurtrissures, pour sûr, nous le reconnaissons
vivant.
- Seigneur, qui nous fera voir le bonheur ? Donne à ton
Eglise de se mettre à ton service, c’est-à-dire au service de toute l’humanité
dans sa quête de bonheur.
- Seigneur, qui nous fera voir le bonheur ? Donne au
monde traversé par la violence de trouver la paix à laquelle il aspire.
- Seigneur, qui nous fera voir le bonheur ? Cette semaine
encore, des migrants en quête de bonheur, plus de quatre cents, ont péri dans
la Méditerranée, certain jetés à mer par leurs compagnons d’embarcation.
- Seigneur, qui nous fera voir le bonheur ? Donne à notre
communauté d’être un lieu où il fait bon vivre, prier et servir les pauvres.
Lecteur Presque 2000 ans après le discours de Pierre aux Juifs de
Jérusalem pour rendre raison de la résurrection de Jésus, des Pierre,
aujourd’hui, s’adressent aux français de Madrid. Mais le discours semble moins
simple à tenir. Parmi les disciples de Jésus, des objections se font entendre
et obligent à réorienter le propos.
Pierre 1. Frères, et vous
tous francophones de Madrid, sachez le.
Si nous croyons que Jésus est
vivant, c’est parce qu’avec lui se sont accomplies les Ecritures. Il est celui
que les prophètes avaient annoncé.
Pierre 2 Ses premiers disciples, bien avant
nous, ont raconté l’avoir vu vivant. Ils ont écrit leur témoignage. C’est ce
que nous appelons l’évangile et le Nouveau Testament. Ce sont eux qui nous
donnent de croire en la résurrection.
Pierre 3 Mais qu’est-ce qui prouve que ces
Ecritures ne sont pas des inventions ? L’Ancien Testament peut viser beaucoup
d’autres « messies ». Le Nouveau peut être le rêve que les disciples
ont pris pour la réalité.
Pierre 4 A-t-on même des preuves de ce que
Jésus a existé ? Nous ne pouvons rien montrer qui lui ait appartenu. On ne
sait pas même pas quand il est né. Le 25 décembre, c’est une invention et il
n’est pas né en zéro. Jésus est né en moins 5 avant Jésus Christ !
Pierre 5 Les Ecritures ne sont pas une preuve
suffisante. Elles constituent des indices. Quant à l’existence de Jésus, elle
est certaine, même si nous n’avons pas de trace archéologique. C’est la même
chose pour quasi tous les personnages de l’Antiquité. On ne connaît pas leur
date de naissance avec précision. Mais puisque Jésus est né, et que nous sommes
ses amis, il faut bien fêter son anniversaire. La date symbolique de la nuit la
plus longue, à Noël, a été choisie parce que Jésus est la lumière qui renverse
les ténèbres.
Pierre 6 Ce n’est pas parce qu’un moine a fait
une petite erreur de calcul au Moyen âge, sans ordinateur, que notre foi serait
ébranlée ou fausse. Oui Jésus est né avant Jésus, c’est plutôt marrant !
Pierre 7 Nous croyons à la résurrection, parce
que si Jésus est né par l’opération du Saint Esprit, il est fort possible qu’il
soit ressuscité
Pierre 8 C’est plutôt l’inverse. C’est parce
que nous le croyons vivant, vainqueur de la mort, que nous avançons qu’il est
né comme tout le monde : il a une maman et un jour, il est mort. Il est
aussi Dieu : c’est comme si Joseph était son père adoptif.
Pierre 9 Nous croyons à la résurrection parce
ce que, depuis deux mille ans, des disciples se sont succédés. Tant d’hommes et
de femmes qui donnent leur vie pour Jésus, comme ceux qui sont martyrisés
encore aujourd’hui. Préférer mourir plutôt que de trahir Jésus, cela donne du
poids à ce qu’ils croient.
Pierre 10 Depuis 2000 ans, des disciples de Jésus
font le bien autour d’eux au nom de Jésus. Le mal existe et de nombreux
chrétiens sont engagés à le combattre.
Pierre 11 Il y a aussi des chrétiens méchants et
des non croyants qui font le bien. Nous voulons une preuve.
Pierre 12 Il n’y a pas de preuve au sens d’un
savoir. Si vous savez par la démonstration que Jésus est ressuscité, vous n’y
croyez pas. Or dans l’amour, l’amitié, il s’agit de faire confiance. Si vous ne
voulez pas faire confiance, jamais vous ne pourrez être disciples, être
croyants.
Pierre 13 Nous croyons que Jésus est ressuscité
parce que, faire confiance en sa parole, lui faire confiance, nous permet de
vivre pour de vrai. Les croyants prennent peut-être moins leurs rêves pour la
réalité que la moyenne, parce que Jésus a été confronté au mal. Ils savent
qu’il faut se démener pour que le monde soit beau. Nous croyons que nous ne
sommes pas seuls pour construire ce monde.
Pierre 14 Toutes ces raisons de croire n’en sont
pas vraiment. Ce sont juste des indices qui disent qu’il n’est pas idiot d’être
disciples de Jésus, que la foi, c’est même parmi les choses les plus
intelligentes. Mais si c’est une affaire de confiance, alors on fait le saut de
la foi sans raison, seulement parce qu’on aime être avec Jésus, avec ses
disciples, au service des autres. Nous croyons à la résurrection de Jésus sans
raison, à cause de rien, seulement parce que c’est lui.
Démontrer la résurrection de Jésus par l'existence d'une communauté de disciples, ne me paraît pas votre meilleur argumentation… Bouddha à des millions de disciples, que je sache, il n'est pas ressuscité…
RépondreSupprimerÊtre disciple d'un homme mort cela se rencontre dans toute histoire de l'humanité. Les philosophes se réclament tous de Maîtres morts et bien morts depuis lurette… bien des hommes « incarnent » une figure disparue et en ce sens la rendent vivante. N'est-ce pas là aussi une forme de résurrection ?
D'ailleurs, comme vous le dites par ailleurs, la résurrection ne se prouve pas, dans le meilleur des cas, elle s'éprouve dans la chair d'une personne. Si on ne peut témoigner que d'une accumulation de pratiques rituelles sans cesse réitérées, sans témoigner en premier d'une résurrection personnelle vécue dans sa chair et son esprit, alors il n'y a aucun témoignage valable… mais en ce cas, les pratiques rituelles n'ont plus aucune espèce d'intérêt… on peut très bien faire mémoire sans tout ce falbala devenu risible tant il est folklorique, aussi désuet qu'incongru à nos contemporains.
Témoignez-vous personnellement de cela ?
En revanche, votre exclamation finale me plaît bien, sauf que bien évidemment j'en inverse les termes : Jésus oui, l'église non !
Jésus n’est vivant que pour celui qui le fréquente dans une relation personnelle et intime. Je reconnais que cette relation peut s’enrichir dans le cadre d'un partage avec d'autres, formant alors plus ou moins communauté. Il peut en découler un vivre ensemble au service de « Quelque chose» qui sera dans la ligne des enseignement de Jésus. Toute église institutionnalisée, ritualisée, totalement réifiée actuellement, est non seulement inutile, mais tout particulièrement contre productive, voir relevant du contre témoignage que l'on peut quotidiennement constater dans les pratiques et les frasques des prélats ainsi que de ceux qui les servent comme des petits sujet de ces petits roitelets.
Avec un petit supplément en fin de texte qui aurait mérité d'être refondu avec le reste.
SupprimerJe comprends que l'on renverse une expression qui serait celle de l'Action Française ou de la Manif pour tous, si c'est effectivement différent, 'L'Eglise oui, Jésus non". Mais je ne la renverse pas cependant.
RépondreSupprimerComment l'Eglise existerait-elle sans sa tête et le Christ sans son corps. C'est forcément l'un et l'autre. Et ce corps si laid à certains égards, pas si mal à d'autres, il l'a tellement aimé qu'il l'a rendu immaculé, ainsi que le dit Paul.
Je comprends bien votre affirmation de l'un et l'autre.... J'imagine mal que de par votre position et vos croyances il en soit autrement pour vous....
SupprimerJe ne partage pas cela. C'est tout. Jésus n'a nul besoin d'une religion comme il y en a tant ! et comme il les a dénoncées....
Ce que dit Paul n'est pas ce que Jésus dit....
(ah oui c'est vrai il parle au nom du Christ..... désolé je préfère ce qui est rapporté d'un certain "en direct" de ceux qui l'on côtoyé..... (Jésus, pas Paul !)
Méfiez-vous sur Paul. Ses écrits sont plus anciens, de vingt ans minimum, et de quarante ans en moyenne que les autres écrits du NT, y compris les évangiles. Il n'a pas vu Jésus en direct, mais les autres hagiographes sans doute guère plus. Si l'on veut être critique, il faut l'être jusqu'au bout. Paul a plus de chance d'être fidèle à Jésus que les évangélistes !
RépondreSupprimeril m'a longtemps été difficile de croire, l'incarnation en particulier me posait problème. Aujourd'hui je peux dire que le Christ donne vraiment un sens à ma vie. Je rêve d'un monde ou être un homme ce n'est pas être capable de se servir d'un fusil comme dans le dernier film (theeb) vu au cinéma, ou plus puissant, plus riche, plus intelligent que son voisin, mais d'un monde où ensemble nous pouvons partager, créer ce monde que Dieu nos a confié. Pour moi le Christ, c'est l'espérance d'un homme nouveau, sa résurrection c'est un peu celle que je vis au quotidien dans les relations que je tisse.
RépondreSupprimerPour le voyageur, j'ai beaucoup de mal avec l'institution, mais je lui dois les deux prêtres de notre paroisse qui ont su nous pousser à la rencontre. J'ai découvert une belle communauté ou il fait bon faire les choses ensemble : peindre, participer à l'animation des messes, réfléchir sur l'évangile, partager un repas. Je trouve personnellement qu'il est plus facile d'être chrétien ensemble que tout seul.
bonne journée à tous les deux,
Florence