15/12/2012

L'apocalypse, une bonne nouvelle (3ème dim. Avent)


« Par ces exhortations et bien d'autres encore, le Baptiste annonçait au peuple la Bonne Nouvelle », il évangélisait le peuple. Qu’est-ce qu’annoncer l’évangile ? Le texte que nous venons d’entendre (Lc 3, 10-18) parle de cognée à la racine de l’arbre (au verset 9), de pelle à vanner, de paille qui brûle dans un feu qui ne s’éteint pas. C’est une apocalypse !
Tenir un discours apocalyptique, certains le font, mais on peut dire que leur audience reste confidentielle. Il n’y a que quelques illuminés ou malades pour ne pas rire à entendre parler de Bugarach et de la fin du monde la semaine prochaine. Il n’y a que les extrémistes, intégristes radicaux, qui se délectent de condamnations fulminées contre notre société dont ils ne cessent de prédire la décadence, la déchéance, la fin.
Quel discours apocalyptique pourrions-nous tenir qui soit entendu comme une bonne nouvelle ? Car c’est bien cela le pari : que l’évangile soit entendu, même si c’est une apocalypse que nous annonçons.
Il n’y a qu’une solution, il me semble, non le recours à la peur, mais l’ouverture d’un espoir. Comment, en prédisant la fin, comment, par une apocalypse, susciter l’espérance ? Comme le livre de Jean, l’autre Jean. Ce dont la fin approche, ce dont la fin est inexorable, ce dont la fin ne peut être qu’attendue, espérée, ce qui est engloutie dans des catastrophes sans nom, c’est le mal.
Voilà l’apocalypse. La fin du mal, la désintégration du mal, sa disparition. Imaginez un peu. Il ne se fera plus rien de mal sur ma montagne sainte, dit le Seigneur en Isaïe. Voici que je fais toutes choses nouvelles (Ap 21,5) rapporte le visionnaire de Patmos, renchérissant sur Isaïe encore : Voici que moi, je vais faire du neuf, il bourgeonne déjà ; ne le voyez-vous pas ? (Is 43,18)
Si le mal est terrassé, si c’est la catastrophe pour le mal, si la fin du monde est naissance d’un monde de justice et de paix, alors, là, c’est une bonne nouvelle ! Et l’évangile est annoncé, à la suite du Baptiste, comme une fin, comme une apocalypse, désirée et non crainte, si ce n’est pas ceux qui pactisent avec le mal, si ce n’est pas ce qui en nous est lié au mal. C’en est fini du mal, ce doit être la fin du mal.
Il va de soi que l’annonce apocalyptique de l’évangile se fait non seulement en parole, mais aussi en acte. Car la fin du mal s’annonce par l’engagement contre le mal, par la lutte contre les injustices, par la solidarité et la paix.
Reste à envisager ce que nous devons attendre de cette annonce. Pourquoi annoncer l’évangile, pour quoi, en vue de quoi l’annoncer ? S’agit-il de faire de tous les hommes des chrétiens ? Quelle drôle d’idée. Je ne la vois nullement dans le discours de Jean. Je ne la vois nullement dans ce que nous venons de dire.
En revanche nous avons parlé de déclarer la fin du mal. Et cette lutte contre le mal, tout homme est invité à y prendre part. Nous ne sommes pas les seuls, disciples de Jésus, à la souhaiter et à y œuvrer. Mais nous, disciples de Jésus, avons reçu mission expresse d’y œuvrer, nous ne pouvons nous dérober. Nous avons aussi mission d’en manifester l’origine, les conséquences et le sens : La vie de l’homme est vraiment ce qu’elle est appelée à être quand l’humanité est une fraternité.
Jésus nous fait connaître son Dieu comme le Père qui fait de chacun de nous son enfant bien-aimé. Le Dieu de Jésus est le champion de l’adoption et par là institue l’humanité comme fraternité. Quelle fratrie si Jésus en est membre, quelle famille si Dieu en est le Père !
Nous pouvons légitiment trouver qu’il serait bien que tous connaissent ce Père, ce frère. Mais cela paraît difficile tant l’histoire pèse, tant le pluralisme culturel doit être maintenu pour lutter contre l’uniformisation de la mondialisation. Ce n’est pas même nécessaire. Pour Dieu lui-même, la fraternité est plus importante que sa reconnaissance comme Père : il importe davantage à Dieu que les hommes vivent dans l’unité et la paix qu’ils ne le reconnaissent comme Père.. Le Père, lui, a reconnu tous ses enfants ; les enfants ne reconnaissent pas tous le Père. Et alors ? Ils n’en sont pas moins ses enfants ! Et alors ? ils peuvent être heureux ! Et alors ? Ils peuvent même lui rendre un culte dès lors qu’ils sont au service de leurs frères et s’avancent sur le chemin de la vie.
Annoncer l’évangile, c’est mettre le grain de sable dans la machine à broyer les frères, c’est mettre notre grain de sel pour révéler à tous le bon goût de cette fraternité, c’est goûter nous-mêmes cette fraternité et la bonté du Père. Et qui nierait à quelques jours de Noël qu'il est bon de vivre en grâce avec les frères et de rendre grâce à notre Père ?

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