03/03/2023

Transfiguration. Silence ! on meurt... (2ème dimanche de carême)

Jésus leur donna cet ordre : Ne parlez de cette vision à personne, avant que le Fils de l’homme soit ressuscité d’entre les morts. » (Mt 17, 1-9) L’ordre de Jésus est dit-il définitivement dépassé depuis sa résurrection ? Ne concernerait-il que les quelques mois entre la transfiguration et la résurrection ? S’il est désormais caduc, on se demande pourquoi il a été rapporté. Au moment de la rédaction de l’évangile, une cinquantaine d’années après les faits, pourquoi cette précision ? En quoi aidait-elle les disciples des années 90 à être disciples ? 

Et si l’ordre de ne rien dire de la transfiguration demeurerait. « Silence », « ferme-la » comme Jésus dit à la mer en Marc. Silence ! tant que la résurrection n’est pas effective, et la résurrection de Jésus, c’est celle de son corps continué dans l’humanité de chaque aujourd’hui du temps. La résurrection de Jésus n’est pas un moment de l’histoire, mais une confession de foi, risquée à chaque génération par des hommes et des femmes, aujourd’hui encore.

La résurrection de Jésus n’est toujours et seulement accessible, effective que comme profession de foi. Il n’est qu’à relire les chapitres évangéliques dits d’apparition du Ressuscité. Ils mettent toujours en scène des professions de foi, ou, plus encore, le long et difficile acheminement vers la profession de foi des disciples.

Autant dire que la nouvelle de la résurrection n’est pas encore arrivée à nombre de disciples. Il ne suffit pas d’avoir suivi Jésus, d’être séduit par son enseignement, ni même de le prier pour être un croyant. Il faut changer de vie, ainsi que nous le disions en commençant le carême. Seuls les chrétiens convertis sont croyants. Vous excuserez le pléonasme, on est croyant quand on est converti. Qui l’est parmi nous ? Il n’y eut peut-être qu’un seul croyant, perpétuellement tourné vers le Père, Jésus, le converti du Père.

Si la résurrection était effective pour nous, nous serions aussi des convertis du Père, tournés comme lui, et avec lui vers les frères. Alors, il demeure d’actualité de taire la transfiguration. Il y a mensonge à parler de transfiguration de Jésus, d’apparition de Jésus dans sa gloire tant que la résurrection ne nous a pas converti, parce que nous sommes comme les esprits mauvais à savoir qui est Jésus et à n’en rien faire. C’est pire que de rejeter Jésus. Cela fait croire que l’on est disciple ‑ y compris à nous-mêmes qui en sommes convaincus ‑ cela laisse penser que nous sommes de fiables index, comme le Baptiste, alors que nous détournons le regard des autres vers et par l’horreur de nos refus de croire, de nous laisser ressusciter, nos refus de la résurrection.

La transfiguration est une résurrection… autant qu’un exorcisme. Les propos de Jésus son autant ceux qu’il adresse aux disciples mécréants qu’aux possédés libérés et autres malades : « Jésus, s’approchant, les toucha et leur dit : "Relevez-vous, et n’ayez pas peur." »

Il y a à la fin de l’évangile de Matthieu une autre transfiguration. Personne ne l’appelle jamais ainsi, pas même l’évangile. Et pourtant. La transfiguration, en grec métamorphose, transformation de Jésus, connaît un autre épisode, lorsqu’il n’a plus figure humaine, sur une autre montagne, le calvaire. Juste avant, Jésus est méconnaissable et donc méconnu. Personne ne le reconnaît, ni les justes, ni les boucs de la charité. « Seigneur, quand nous est-il arrivé de te voir affamé, assoiffé, étranger, nu, malade ou prisonnier ?" Et le roi leur fera cette réponse : "En vérité je vous le dis, dans la mesure où vous l'avez fait, ou pas, à l’un de ces plus petits de mes frères, c'est à moi que vous l'avez fait, ou pas." »

La métamorphose, la transfiguration de Jésus n’est possible à révéler que lorsque la gloire de Jésus est reconnue, lorsque Jésus est reconnu c’est-à-dire secouru dans les frères écrasés. Alors la résurrection est arrivée jusqu’à nous et l’on ne ment plus à parler de Jésus. S’il faut monter des tentes, ce n’est pas sur le Thabor ‑ Jésus ne fait aucun cas de la proposition de Pierre. La tente de la rencontre, le sanctuaire où Dieu séjourne avec sa gloire, ce sont les fameux « hôpitaux de campagnes ». « Le temple de Dieu est saint, et ce temple, c’est vous ! »

La transfiguration. « Silence, on meurt ! ». Nos églises sont mensonge à n’être pas hôtels-Dieu. Drame des disciples qui sont convaincus de se remuer pour l’annonce de l’évangile et qui en détournent. « Convertissons-nous et croyons à l’évangile. »

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